Il s'agit d'un cours complet intĂ©gralement rĂ©digĂ© dâIntroduction au droit civil. En l'occurrence, câest un cours du 1er semestre en Licence 1 de Droit, science politique, en Institut dâĂtudes politiques et parfaitement valable dans dâautres cursus. Ce document clair, exhaustif 53 pages et trĂšs structurĂ© sâavĂšrera idĂ©al pour de nombreuxses Ă©tudiantes en Droit, science politique, IEP, IPAG, AES, GEA, LEA⊠et bien entendu toute autre intĂ©ressĂ©e comme par exemple pour prĂ©parer certains concours. Nota bene police utilisĂ©e dans le document Times New Roman 10. Voici le plan Introduction gĂ©nĂ©rale. Section 1 Lâorganisation de lâenseignement § 1. Le cours § 2. Les travaux dirigĂ©s § 3. La bibliographie Section 2 GĂ©nĂ©ralitĂ©s sur le droit § 1. Quâest-ce quâune rĂšgle de droit ? A. Ce que nâest pas une rĂšgle de droit ? B. Ce quâest la rĂšgle de droit ? 1° Le caractĂšre gĂ©nĂ©ral et impersonnel 2° Le caractĂšre coercitif de la rĂšgle de droit § 2. Comment utilise-t-on une rĂšgle de droit ? § 3. OĂč trouve-t-on la rĂšgle de droit ? A. Le texte Ă©crit B. La jurisprudence C. La doctrine § 4. Comment classe-t-on les rĂšgles de droit ? A. La distinction entre le droit interne et le droit externe international 1° Le droit international public il sâagit du droit rĂ©gissant les relations entre les Etats. 2° Le droit international privĂ© il sâagit du droit qui sâoccupe des relations internationales privĂ©es. B. La distinction entre le droit public et le droit privĂ© Section 3 Lâorganisation juridictionnelle française § 1. La sĂ©paration en deux ordres de juridictions § 2. Les juridictions de lâordre judiciaire A. Les juridictions civiles B. Les juridictions rĂ©pressives § 3. Les juridictions de lâordre administratif 1Ăšre partie Le droit, envisagĂ© comme un ensemble de rĂšgles le droit objectif TITRE Ier LES SOURCES ECRITES Chapitre 1. Les sources internes Section 1 La Constitution § 1. Le contenu de la Constitution de la Ve RĂ©publique § 2. Le rĂŽle du Conseil constitutionnel Section 2 La loi et le rĂšglement § 1. Les caractĂšres communs de la loi et du rĂšglement A. Le caractĂšre gĂ©nĂ©ral B. Le caractĂšre obligatoire 1° Les lois supplĂ©tives de volontĂ© 2° Les lois impĂ©ratives C. Le caractĂšre permanent § 2. Les caractĂšres spĂ©cifiques A. Les diffĂ©rences de domaines 1 Le rĂšglement pris pour lâexĂ©cution des lois 2 Le rĂšglement autonome B. La diffĂ©rence de procĂ©dure la procĂ©dure dâĂ©laboration et de mise en vigueur de la loi a Lâadoption b Le contrĂŽle du Conseil constitutionnel c LâentrĂ©e en vigueur de la loi 1° La promulgation 2° La publication Chapitre 2. Les sources internationales Section 1 Le droit international des droits de lâhomme § 1. Les textes relatifs § 2. La sanction Section 2 Le droit communautaire § 1. Bref historique de la construction europĂ©enne § 2. Les institutions communautaires § 3. Les rĂšgles communautaires 1° Le rĂšglement communautaire 2° La directive communautaire TITRE IIe LES SOURCES NON-ECRITES Chapitre 1. La Jurisprudence Section 1 Les contraintes pesant sur le juge § 1. Lâobligation de juger § 2. Lâobligation de ne pas lĂ©gifĂ©rer A. La signification de lâarticle 5 du Code civil B. Le corollaire de lâarticle 5 du Code civil C. LâattĂ©nuation de lâarticle 5 du Code civil 1 ArrĂȘt dâespĂšce 2 ArrĂȘt de principes § 3. Lâobligation de motiver ses dĂ©cisions 1° Les motifs 2° Le dispositif Section 2 Les fonctions du juge § 1. LâĂ©volution des mĂ©thodes dâinterprĂ©tation A. LâEcole des exĂ©gĂšses B. LâEcole de la libre recherche scientifique § 2. Les procĂ©dĂ©s actuels dâinterprĂ©tation A. Les arguments B. Les maximes dâinterprĂ©tation Section 3 Le pourvoi en cassation § 1. Lâorganisation de la Cour de cassation § 2. La saisie de la Cour de cassation § 3. La typologie des arrĂȘts de la Cour de cassation A. Les arrĂȘts de cassation B. Les arrĂȘts de rejet Chapitre 2. La Coutume et les usages Section 1 La notion de Coutume § 1. Les composantes de la Coutume A. LâĂ©lĂ©ment matĂ©riel B. LâĂ©lĂ©ment psychologique § 2. Les caractĂšres de la Coutume Section 2 LâautoritĂ© de la Coutume § 1. La Coutume obligatoire en vertu de la loi § 2. La Coutume obligatoire dans le silence de la loi § 3. La Coutume contraire Ă la loi TITRE IIIe LES CONFLITS DE NORMES Chapitre 1. Les conflits temporels de normes Section 1 La problĂ©matique du conflit temporel de normes § 1. Les diffĂ©rentes solutions possibles § 2. Les diffĂ©rentes solutions envisageables Section 2 La rĂ©solution en droit positif du conflit temporel de normes § 1. Le principe Lâeffet immĂ©diat de la loi nouvelle A. Les droits acquis et les simples expectatives B. La crĂ©ation des droits et effets Ă venir § 2. Les exceptions au principe de lâeffet immĂ©diat de la loi nouvelle A. La rĂ©troactivitĂ© de la loi nouvelle B. La post-activitĂ© de la loi ancienne Chapitre 2. Les conflits hiĂ©rarchiques de normes Section 1 La conformitĂ© des TraitĂ©s Ă la Constitution § 1. La supĂ©rioritĂ© de la Constitution sur les TraitĂ©s § 2. Le contrĂŽle de la conformitĂ© des TraitĂ©s Ă la Constitution Section 2 Le contrĂŽle de la loi Ă la Constitution § 1. Lâabsence de contrĂŽle par le juge ordinaire § 2. Le contrĂŽle par le Conseil constitutionnel Section 3 Le contrĂŽle de la conformitĂ© de la loi au TraitĂ© § 1. Lâabsence de contrĂŽle par le Conseil constitutionnel § 2. Le contrĂŽle par le juge ordinaire Section 4 Le contrĂŽle de la conformitĂ© du rĂšglement aux normes supĂ©rieures 2Ăšme partie Le droit, envisagĂ© comme un ensemble de prĂ©rogatives les droits subjectifs TITRE Ier LES TITULAIRES DU DROIT SUBJECTIF Chapitre 1. Les personnes physiques Section 1 Lâidentification des personnes physiques § 1. Le nom § 2. Le domicile § 3. La nationalitĂ© Section 2 Lâexistence de la personnalitĂ© juridique § 1. Le dĂ©but de la personnalitĂ© juridique A. La naissance B. La conception § 2. La fin de la personnalitĂ© juridique A. La mort B. Lâabsence Section 3 Les degrĂ©s de la personnalitĂ© juridique § 1. LâincapacitĂ© de jouissance § 2. LâincapacitĂ© dâexercice Chapitre 2. Les personnes morales Section 1 La reconnaissance de la personnalitĂ© morale § 1. Les groupements reconnus § 2. Les groupements non-reconnus A. La controverse doctrinale B. La solution jurisprudentielle Section 2 Le rĂ©gime de la personnalitĂ© morale A. Lâidentification de la personnalitĂ© morale B. La capacitĂ© de la personnalitĂ© morale
JeanMichel Hayat, nĂ© le 2 mars 1955 Ă Paris, est un magistrat français, premier prĂ©sident de la cour d'appel de Paris d' octobre 2019 [1] Ă juin 2022.. CarriĂšre Formation et dĂ©but de carriĂšre. Jean-Michel Hayat est issu de l'Ăcole nationale de la magistrature, qui forme l'ensemble des magistrats de France. En 1988, alors juge d'instruction Ă Nanterre, il lance les investigations
Texte intĂ©gral 1 De Mulder V., La Belgique se rapproche dâun Ătat voyou, pour le plus haut magistrat du pays », RT ... 1 Quel respect donner Ă un Ătat qui marchande sa fonction la plus archaĂŻque, qui est de rendre la Justice ? [âŠ] Cet Ătat nâest plus un Ătat de droit, mais un Ătat voyou ». Câest par ces mots que le Chevalier Jean de Codt, premier prĂ©sident de la Cour de cassation, a fait trembler la sphĂšre mĂ©diatique belge le dimanche 15 mai 2016, Ă lâoccasion dâune interview tĂ©lĂ©visĂ©e remarquĂ©e1. Sorti de sa rĂ©serve selon certains, incarnant sa fonction pour dâautres, lâĂ©vĂšnement mĂ©rite dâĂȘtre plus amplement analysĂ©. Il Ă©veille en effet une myriade de rĂ©flexions sur la place du pouvoir judiciaire et de lâacte de juger Ă lâheure actuelle. 2 Somers P., Le printemps de la justice - Actes du colloque du 27 fĂ©vrier 2015 organisĂ© par lâUnion ... 2Paul Somers rĂ©sume la problĂ©matique en ces mots en cherchant Ă moderniser lâappareil judiciaire, la Belgique aurait-elle renoncĂ© Ă affirmer la sĂ©paration des pouvoirs, le respect du procĂšs Ă©quitable et lâindĂ©pendance de la justice ? »2. Nous proposons de nous focaliser, dans la prĂ©sente contribution, sur la question de savoir si les rĂ©formes judiciaires qui ont Ă©tĂ© menĂ©es au cours des derniĂšres annĂ©es ont affectĂ© â et le cas Ă©chĂ©ant, dans quelle mesure â le principe de la sĂ©paration des pouvoirs. 3Il sâagit lĂ dâun principe bien connu et souvent Ă©voquĂ© par les acteurs et les commentateurs de la vie politique. La rĂšgle est cependant plus difficile Ă cerner et certainement moins absolue quâil nây paraĂźt de prime abord. Pour tenter de rĂ©pondre Ă la question que nous avons formulĂ©e, il sera donc nĂ©cessaire de revenir, au moins briĂšvement, sur la portĂ©e du principe I. Ce nâest quâensuite que nous pourrons nous intĂ©resser aux enjeux actuels et nous demander si les rĂ©formes entreprises par le lĂ©gislateur sont de nature Ă entrer en conflit avec le principe fondamental II. Nous poursuivrons enfin la rĂ©flexion en nous fondant sur une sĂ©rie dâexemples choisis, dans le but dâessayer de concilier certains antagonismes que lâanalyse aura fait apparaĂźtre III. I. SĂ©parer ou Ă©quilibrer les pouvoirs 3 Pariente A. dir., La sĂ©paration des pouvoirs â ThĂ©orie contestĂ©e et pratique renouvelĂ©e, Paris, D ... 4Pour asseoir notre rĂ©flexion sur des bases suffisamment solides, il convient de revenir en premier lieu sur lâorigine et la signification de la notion de sĂ©paration des pouvoirs. Le concept, comme celui de dĂ©mocratie, est un de ceux quâon utilise beaucoup sans ĂȘtre nĂ©cessairement en mesure de lui donner une portĂ©e prĂ©cise. On a ainsi pu relever que [l]a sĂ©paration des pouvoirs est paradoxalement lâun des concepts juridiques les plus connus du grand public et lâun des moins Ă©tudiĂ©s des juristes »3. 5Dans les pages qui suivent, nous aborderons successivement la conception prĂ©sente dans lâĆuvre classique de Montesquieu A, puis la thĂ©orie Ă©tablie par les pĂšres fondateurs des Ătats-Unis dâAmĂ©rique B, avant de nous focaliser sur le principe tel quâil sâest dĂ©veloppĂ© en droit belge C. La sĂ©paration des pouvoirs selon Montesquieu 6LâidĂ©e selon laquelle il est prĂ©fĂ©rable de partager le pouvoir Ă©tatique entre diffĂ©rentes personnes ou diffĂ©rents organes nâest pas neuve. Elle Ă©tait mise en Ćuvre dans bon nombre de systĂšmes politiques dĂšs lâAntiquitĂ©. Pour ne prendre quâun seul exemple, on sait que, sous la RĂ©publique romaine, lâautoritĂ© publique Ă©tait rĂ©partie entre diffĂ©rentes assemblĂ©es et magistratures. 4 Voy. en particulier le chapitre 12 du DeuxiĂšme TraitĂ©. 5 Locke J., Deux traitĂ©s de gouvernement civil 1690, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, 1997, ... 6 Locke J., p. 220. 7La thĂ©orisation de la sĂ©paration des pouvoirs, dans son acception contemporaine, remonte toutefois Ă des siĂšcles plus rĂ©cents. Contrairement Ă lâidĂ©e reçue, ce nâest pas au baron de Montesquieu, mais Ă John Locke, que revient la paternitĂ© de la division tripartite des pouvoirs4 et la recommandation dâune certaine sĂ©paration dans leur attribution5. NĂ©anmoins, Ă©lĂ©ment fort intĂ©ressant pour notre propos, cet auteur nâidentifiait pas, Ă lâĂ©poque, de pouvoir judiciaire Ă part entiĂšre. Ă cĂŽtĂ© des pouvoirs lĂ©gislatif et exĂ©cutif dont il affirmait lâexistence se trouvait un pouvoir dit fĂ©dĂ©ratif, lequel incluait le pouvoir de faire la guerre et la paix, de conclure des ligues et des alliances et de traiter nâimporte quelle affaire avec toutes les personnes et toutes les communautĂ©s qui sont en dehors de la rĂ©publique »6. 8Lâapport de Montesquieu est toutefois significatif, Ă deux titres au moins il a non seulement mis en Ă©vidence lâintĂ©rĂȘt de la sĂ©paration des pouvoirs, en insistant sur les consĂ©quences nĂ©fastes de leur rĂ©union, mais il a aussi prĂŽnĂ© lâautonomie du pouvoir judiciaire. On lui connait cette phrase cĂ©lĂšbre 7 Montesquieu, p. 206. il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrĂȘte le pouvoir »7. 9Selon le philosophe, la sĂ©paration des pouvoirs doit donc dĂ©couler de la structure institutionnelle dâun Ătat ; de prĂ©fĂ©rence par le moyen dâune constitution qui prĂ©voit que ces pouvoirs sont exercĂ©s par des titulaires diffĂ©rents, dans le but de se prĂ©munir de lâautoritarisme. Ainsi, en ce qui concerne le pouvoir judiciaire, le magistrat bordelais affirme quâ 8 Ibid., p. 208. Il nây a point [âŠ] de libertĂ©, si la puissance de juger nâest pas sĂ©parĂ©e de la puissance lĂ©gislative et de lâexĂ©cutrice. Si elle Ă©tait jointe Ă la puissance lĂ©gislative, le pouvoir sur la vie et la libertĂ© des citoyens serait arbitraire ; car le juge serait lĂ©gislateur. Si elle Ă©tait jointe Ă la puissance exĂ©cutrice, le juge pourrait avoir la force dâun oppresseur. Tout serait perdu, si le mĂȘme homme, ou le mĂȘme corps des principaux, ou des nobles, ou du peuple, exerçaient ces trois pouvoirs celui de faire des lois, celui dâexĂ©cuter les rĂ©solutions publiques, et celui de juger les crimes ou les diffĂ©rends des particuliers »8. 10Si lâon se penche plus avant sur le pouvoir judiciaire, on remarque que Montesquieu le distingue des deux autres en ce quâil sâexerce directement sur les particuliers, de sorte que ceux-ci sont immĂ©diatement soumis Ă son emprise. Pour pallier les risques accrus dâarbitraire que prĂ©sente cette situation, Montesquieu dĂ©veloppe une conception du juge en retrait par rapport au pouvoir politique ; celle-ci a fait date Ă travers deux phrases-clĂ©s de lâEsprit des lois 9 Ibid., p. 216. les juges de la nation ne sont ⊠que la bouche qui prononce les paroles de la loi »9. 10 Ibid., p. 212. Des trois puissances âŠ, celle de juger est, en quelque façon, nulle »10. 11 Lambert E., Le Gouvernement des juges, Paris, Giard, 1921, pp. 4-5. 12 Voy. le titre VIII de la Constitution de la RĂ©publique française. 13 DelpĂ©rĂ©e F., La sĂ©paration des pouvoirs, aujourdâhui », 1990, p. 126. 11Cette idĂ©e continue Ă marquer la vision de la justice et du juge, en Belgique comme dâailleurs en France. La crainte dâun gouvernement des juges », expression que lâon doit Ă Ădouard Lambert11, y est devenue un marronnier de la doctrine juridique. En France, la mission de rendre la justice est attribuĂ©e, selon la Constitution de 1958, Ă lâautoritĂ© judiciaire12, plutĂŽt quâau pouvoir judiciaire â la diffĂ©rence est symboliquement forte. En Belgique, le CongrĂšs national Ă©tait, en 1830-1831, imprĂ©gnĂ© de la conception de Montesquieu ; comme lâa Ă©crit Francis DelpĂ©rĂ©e, il a choisi de contenir la fonction judiciaire dans lâoptique de placer les juges hors du jeu politique »13. La notion amĂ©ricaine des checks and balances 12Quelques annĂ©es aprĂšs la publication de Lâesprit des lois, la pensĂ©e de Montesquieu a jouĂ© un rĂŽle important dans lâĂ©laboration de la Constitution des Ătats-Unis dâAmĂ©rique. On retrouve en particulier lâidĂ©e dans la pensĂ©e dâAlexander Hamilton, James Madison et John Jay. Ces trois hommes politiques ont rĂ©digĂ©, sous le pseudonyme de Publius, les cĂ©lĂšbres Federalist papers, Ă travers lesquels ils plaidaient pour lâadhĂ©sion de lâĂtat de New York Ă la Constitution de 1787. Selon les auteurs, 14 Hamilton A., Jay J. et Madison J., Le FĂ©dĂ©raliste 1788, Paris, Classiques Garnier, 2012, p. 379. Lâaccumulation de tous les pouvoirs, lĂ©gislatif, exĂ©cutif et judiciaire, dans les mĂȘmes mains ⊠peut justement ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme la vĂ©ritable dĂ©finition de la tyrannie »14. 15 Hamilton A., Jay J. et Madison J., p. 381, câest nous qui soulignons. 16 Pour une analyse des oppositions, voy. Manin B., FrontiĂšres, freins et contrepoids la sĂ©paratio ... 13Les auteurs amĂ©ricains insistent sur le fait que lâobjectif nâest pas tant la sĂ©paration hermĂ©tique entre les pouvoirs, que leur Ă©quilibre et leur interaction. Il nâest donc pas inconcevable, selon eux, quâune mĂȘme personne ou un mĂȘme organe contribue Ă lâexercice de plusieurs pouvoirs diffĂ©rents. Ce nâest que lorsque la totalitĂ© du pouvoir dâun dĂ©partement est exercĂ©e par les mĂȘmes mains qui possĂšdent la totalitĂ© du pouvoir dâun autre dĂ©partement, [que] les principes fondamentaux dâune Constitution libre sont renversĂ©s »15. LâĂ©quilibre des pouvoirs peut en pratique ĂȘtre atteint par le biais des checks and balances les freins et contrepoids, qui sont des mĂ©canismes structurels et institutionnels destinĂ©s Ă Ă©viter quâun pouvoir prennent lâascendant sur un autre, sans pour autant requĂ©rir un cloisonnement strict16. 17 Hamilton A., Jay J. et Madison J., p. 390, câest nous qui soulignons. [C]e que nous cherchions ce nâĂ©tait pas seulement un gouvernement qui repose sur des principes libres, mais encore dont les pouvoirs soient ainsi divisĂ©s et Ă©quilibrĂ©s entre les diffĂ©rents corps de magistrature quâaucun ne puisse dĂ©passer ses limites lĂ©gales sans ĂȘtre effectivement freinĂ© et contenu par les autres »17. 18 Wodon L., ConsidĂ©rations sur la sĂ©paration et la dĂ©lĂ©gation des pouvoirs en droit public belge, Bru ... 14Si Montesquieu nâa guĂšre dĂ©veloppĂ© cette dimension dans son Ćuvre, il semble quâelle ne soit pas incompatible avec sa pensĂ©e et quâelle vient au contraire adĂ©quatement la complĂ©ter. Nous pensons en effet, avec Louis Wodon, que [c]e nâest pas tant Ă la sĂ©paration des pouvoirs [âŠ] que Montesquieu attache de lâimportance [âŠ] quâĂ leur Ă©quilibre »18. 19 Pour une plus ample analyse, voy. Behrendt C. et Bouhon F., Introduction Ă la thĂ©orie gĂ©nĂ©rale de l ... 20 Behrendt C. et Bouhon F., p. 165. 15Sans approfondir ici lâanalyse des Federalist papers19, on peut relever que leurs auteurs distinguent les amĂ©nagements externes recours au peuple, Conseil des censeurs, quâils ne prĂ©conisent pas, des amĂ©nagements internes, qui reçoivent leur faveur. Ces derniers consistent en un systĂšme au sein duquel les organes auxquels est confiĂ© lâexercice dâun Pouvoir seraient en mesure dâempĂȘcher les abus Ă©ventuels dâautres organes »20. Nous verrons que câest le parti quâa pris lâordre juridique belge en ce qui concerne la sĂ©paration des pouvoirs. La sĂ©paration ou lâĂ©quilibre des pouvoirs en droit belge 16La Belgique connaĂźt le principe de la sĂ©paration des pouvoirs dans son ordre juridique. Son importance et son application Ă lâĂ©gard du pouvoir judiciaire Ă©tait dĂ©jĂ affirmĂ©e Ă la naissance de lâĂtat belge ; on peut notamment lire ce qui suit dans le rapport de Raikem, prĂ©sentĂ© au CongrĂšs National de Belgique au cours des discussions sur la future Constitution 21 Huyttens Ă., Discussions du CongrĂšs national de Belgique 1830-1831, Bruxelles, SociĂ©tĂ© typographi ... Le projet qui vous est prĂ©sentĂ© a rĂ©tabli lâexistence des trois pouvoirs âŠ. Ainsi, le pouvoir exĂ©cutif ne pourra pas empiĂ©ter sur les autres branches de pouvoirs. Le pouvoir judiciaire en est indĂ©pendant ; il est exercĂ© par les cours et tribunaux ; lâaction du pouvoir exĂ©cutif ne commence que lorsquâil sâagit dâexĂ©cuter leurs dĂ©cisions » 21. 22 Voy. le n° 8. 23 On peut cependant considĂ©rer quâune conception plus rigide a pu prĂ©valoir et avoir des implications ... 24 Alen A., SĂ©paration ou collaboration des pouvoirs ? », 1990, pp. 221-236, ici p. 222 ; Le ... 25 Conclusions devant Cass., 7 mars 1963, Pas., 1963, I, p. 750. 17Si le terme sĂ©paration » est communĂ©ment utilisĂ©, il nous semble que câest bien lâidĂ©e dâĂ©quilibre des pouvoirs, telle que nous lâavons dĂ©crite supra22, qui sâapplique au Royaume23. Il est dĂšs lors admis que la rĂšgle nâa pas une valeur absolue et que des interactions entre les pouvoirs ont lieu dans une certaine mesure24. Ainsi, selon Walter Ganshof van der Meersch, la sĂ©paration des pouvoirs est un prĂ©cepte, sans valeur absolue, pour le lĂ©gislateur et pour le juge »25. 26 Ceci semble sâopposer Ă la thĂšse de Ch. Faider, qui considĂšre que le pouvoir judiciaire est en quel ... 27 Lemmens P., The Independence of Judiciary in Belgium », in Effectiveness of judicial protection ... 18MĂȘme si la rĂšgle nâest pas consacrĂ©e explicitement par la Constitution, il est dĂ©sormais acquis quâelle a une valeur juridique26 et peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme un principe gĂ©nĂ©ral de droit27. Ceci a notamment Ă©tĂ© affirmĂ© par la Cour constitutionnelle 28 15 octobre 2015, n° 138/2015, Voy. aussi 31 mai 2011, n° 99/2011, et ... La sĂ©paration des pouvoirs est un principe gĂ©nĂ©ral de droit qui doit ĂȘtre interprĂ©tĂ© conformĂ©ment au texte de la Constitution. LâindĂ©pendance du pouvoir judiciaire garantie par le principe gĂ©nĂ©ral de la sĂ©paration des pouvoirs porte par consĂ©quent sur lâindĂ©pendance fonctionnelle des magistrats »28. 29 La question sâest posĂ©e de savoir si le principe avait une valeur constitutionnelle, ou seulement l ... 30 26 novembre 2011, n° 186/2009, 31 12 novembre 2011, n° 67/92, 32 22 juillet 2004, n° 136/2004, Voy. Ă©g. Rosoux G., Vers une dĂ©matĂ©rialisation » des d ... 19Ce principe, dont on a reconnu la valeur constitutionnelle29, est notamment dĂ©duit des articles 33, 36, 37, 40 et 41, alinĂ©a 1er, de la Constitution30. Bien entendu, la rĂšgle nâest pas directement invocable devant la haute juridiction, puisquâelle ne constitue pas en tant que telle une norme de rĂ©fĂ©rence Ă lâaune de laquelle la Cour exerce son contrĂŽle. Le principe peut toutefois ĂȘtre pris en considĂ©ration en combinaison avec les articles de la Constitution dont la Cour est la gardienne en application de sa lĂ©gislation organique31, sans prĂ©judice de la thĂ©orie de lâensemble indissociable32. 33 Cass., 4 septembre 2014, Pas., 2014, pp. 1731-1740. 34 Cass., 8 mai 2012, comm. H. Lamont, Juristenkrant, 16 mai 2012, pp. 10 et 11. 20La Cour de cassation reconnaĂźt elle aussi la sĂ©paration des pouvoirs comme principe gĂ©nĂ©ral de droit. Elle estime dâailleurs que la rĂšgle est dâordre public et quâelle est susceptible dâĂȘtre soulevĂ©e pour la premiĂšre fois devant elle33. La haute juridiction judiciaire y voit Ă©galement une des sources du principe dâindĂ©pendance et dâimpartialitĂ© du magistrat, lequel est prĂ©sumĂ©, jusquâĂ preuve du contraire, [âŠ] statuer en toute impartialitĂ©, indĂ©pendance et objectivitĂ© »34. 35 Alen A. , SĂ©paration ou collaboration des pouvoirs ? », 1990, pp. 221-236, ici pp. 231-23 ... 36 Nous pensons en particulier au principe de nomination Ă vie et Ă la rĂšgle dâinamovibilitĂ© des juges ... 21Un auteur belge contemporain a dâailleurs qualifiĂ© lâindĂ©pendance judiciaire de pierre angulaire de la sĂ©paration des pouvoirs, qui certainement sur ce point conserve sa pleine signification en droit positif »35. Ainsi, alors que dans les rĂ©gimes parlementaires contemporains â tels que celui de la Belgique â la frontiĂšre entre le pouvoir lĂ©gislatif et le pouvoir exĂ©cutif se serait attĂ©nuĂ©e, la sĂ©paration entre ces deux pouvoirs et le troisiĂšme â le judiciaire â serait restĂ©e plus marquĂ©e. Ceci pourrait ĂȘtre expliquĂ© par le fait que la Constitution assure lâindĂ©pendance des juges, notamment par rapport aux autres pouvoirs, Ă travers une sĂ©rie de rĂšgles dont les effets sont concrets36. II. RĂ©former la justice 22AprĂšs avoir rappelĂ© sommairement la portĂ©e de la notion de sĂ©paration des pouvoirs, ce qui nous a amenĂ© Ă insister sur lâidĂ©e dâĂ©quilibre entre les pouvoirs, il convient Ă prĂ©sent de nous demander si cet Ă©quilibre est affectĂ© â et, le cas Ă©chĂ©ant, dans quelle mesure â par les rĂ©centes rĂ©formes du systĂšme judiciaire. 37 Grandjean G. et Wildemeersch J. dir., Les juges dĂ©cideurs politiques ? Essais sur le pouvoir po ... 38 Voy. François L. et Thirion N., Les juges dans la politique », in Grandjean G. et Wildemeersch J. ... 23Ă cet Ă©gard, il peut ĂȘtre opportun de nous demander si lâon vit actuellement une crise de lĂ©gitimitĂ© du juge ou encore une remise en cause du rĂŽle des juridictions dans la sociĂ©tĂ© belge. Force est de constater que ces questions ne manquent pas dâĂȘtre soulevĂ©es. On peut notamment mentionner la rĂ©cente parution dâun ouvrage collectif sur le pouvoir politique des juges37. Dans le cadre de la prĂ©sente contribution, il ne sâagira toutefois pas de dĂ©montrer que les juges exercent des fonctions politiques â dâautres auteurs ont dĂ©jĂ brillamment traitĂ© de cette question38 â mais dâanalyser, Ă la suite des rĂ©centes rĂ©formes en matiĂšre judiciaire, la place et lâimportance que revĂȘt encore le principe de sĂ©paration des pouvoirs, spĂ©cialement quant Ă la marge dâapprĂ©ciation dont bĂ©nĂ©ficie le lĂ©gislateur pour organiser les cours et tribunaux ainsi que pour encadrer leurs missions. 24Afin de rĂ©pondre Ă la question posĂ©e, nous tenterons de montrer quâil existe une certaine tension entre dâune part les aspirations de la sociĂ©tĂ© actuelle, qui motivent certaines Ă©volutions des institutions judiciaires A, et dâautre part les caractĂ©ristiques irrĂ©ductibles du principe dâĂ©quilibre des pouvoirs B. Les nouveaux dĂ©fis de la justice 39 Vigour C., Justice lâintroduction dâune rationalitĂ© managĂ©riale comme euphĂ©misation des enjeux ... 40 Ibidem. 25Nous remarquons que, depuis plusieurs dĂ©cennies, une aspiration nouvelle Ă©mane de lâopinion publique et du monde politique le dĂ©sir dâefficacitĂ© de la justice. Dans ce contexte, le rapport du justiciable Ă la justice a subi une mutation profonde. Celle-ci a connu deux Ă©tapes39 un âcourant modernisateurâ, puis un tournant managĂ©rial »40. 41 Ibid., p. 426. 42 Voy. Jacob R., La grĂące des juges, lâinstitution judiciaire et le sacrĂ© en Occident, Paris, PUF, 20 ... 26Autrefois, la justice sâimposait comme une fonction rĂ©galienne spĂ©cifique »41, hĂ©tĂ©ronome et Ă©manant directement de Dieu. La justice est une machinerie, lourde, imposante et verticale. Le juge, lui, profite toujours dâune construction millĂ©naire dâaura sacrĂ©e » qui entoure son office42. Certes, on peut raisonnablement estimer que la remise en cause de lâinstitution judiciaire et de ses membres nâest pas neuve. De façon intemporelle, chaque procĂšs fait un heureux et un malheureux, la justice nâĂ©tant pas destinĂ©e Ă complaire. La remise en question est toutefois marquĂ©e par une nouvelle donne Ă partir de la seconde moitiĂ© du xxe siĂšcle. LâĂ©volution sâattache Ă dĂ©construire les structures, jugĂ©es complexes et archaĂŻques, dans un monde qui connaĂźt une juridicisation des comportements et une judiciarisation des conflits. Nous y reviendrons. 43 Munungu Lungungu K., Chapitre 4 le management judiciaire ou le glas de lâindĂ©pendance du juge ? ... 27Nous sommes actuellement engagĂ©s dans le second tournant. Il consiste Ă axer la rĂ©flexion autour de lâamĂ©lioration du systĂšme judiciaire sur lâassimilation de la justice Ă un service public, au mĂȘme titre que les autres administrations Ă©tatiques. La perspective dâun service efficace conçu au profit du justiciable-consommateur se substitue dĂšs lors Ă lâidĂ©e de la dĂ©lĂ©gation dâun pouvoir rĂ©galien. Dans ce contexte, on peut par exemple considĂ©rer que lâarriĂ©rĂ© judiciaire, qui engendre souvent des procĂ©dures longues au point de dĂ©sespĂ©rer les concernĂ©s, est un symptĂŽme de lâinadĂ©quation entre la forte demande des justiciables et lâoffre limitĂ©e que peut fournir lâĂtat Ă travers ses institutions. Les techniques managĂ©riales sont donc entrĂ©es dans le champ de lâactivitĂ© judiciaire, au mĂȘme titre que le lexique qui leur est propre. Ainsi, on nâhĂ©site plus Ă y parler de productivitĂ©, de rĂ©sultats, de feedback et de rationalisation des moyens43. LâexposĂ© des motifs de la loi Pot-pourri I » nous semble Ă cet Ă©gard particuliĂšrement illustratif Le projet vise Ă adapter le procĂšs civil aux besoins de notre Ă©poque, de sorte que les procĂ©dures se dĂ©roulent plus rapidement sans compromettre la qualitĂ© avec laquelle la justice est administrĂ©e. Tout dâabord, le droit de procĂ©dure civile est adaptĂ© afin que la Justice puisse se concentrer sur ses tĂąches essentielles et diminuer le nombre de procĂ©dures. Ces propositions ambitionnent une diminution du nombre de causes en degrĂ© dâappel ainsi quâune diminution des affaires devant le tribunal de commerce. Ensuite, les mesures proposĂ©es visent Ă rendre les procĂ©dures civiles plus simples et plus rationnelles grĂące Ă lâadaptation de rĂšgles concernant les vices de forme, une motivation plus simple, un accent mis sur les Ă©lĂ©ments essentiels en cas de dĂ©faut, une limitation de lâintervention du ministĂšre public, une gĂ©nĂ©ralisation du juge unique et une informatisation de la communication au sein de la Justice. 44 Doc. parl., Chambre, sess. 2014-2015, n° 54 1219/001, p. 3. Enfin, ce projet contient Ă©galement un certain nombre de modifications urgentes concernant lâordre judiciaire et la procĂ©dure pĂ©nale »44. 45 Verougstraete I., Comment travailler vite et bien et pour peu d'euros », 2015, p. 153. 46 Et ce sous la forme dâune satisfaction Ă©quitable » aux termes de lâarticle 41 de la Convention. C ... 28Sous lâimpulsion de ce vĆu de rationalisation, certaines mutations de la justice sont dĂ©sormais souhaitables. Elles sont parfois imposĂ©es par la Cour europĂ©enne des droits de lâhomme, en application des droits fondamentaux qui sont consacrĂ©s par la Convention dont elle assure le respect. Lâillustration la plus Ă©clatante est certainement la notion de dĂ©lai raisonnable ». Câest prĂ©cisĂ©ment la demande dâefficacitĂ© de la justice qui a abattu le culte de la lenteur, synonyme de sĂ©rieux, que lâon prĂȘtait Ă lâactivitĂ© juridictionnelle traditionnelle45. DĂ©sormais, le non-respect dâun dĂ©lai raisonnable implique non seulement une violation de la Convention europĂ©enne des droits de lâhomme, mais Ă©galement la responsabilitĂ© de lâĂtat dans sa fonction de juger, au profit du justiciable lĂ©sĂ© » sans Ă©gard dâailleurs Ă son Ă©ventuelle culpabilitĂ©, lequel peut ensuite prĂ©tendre Ă une rĂ©paration financiĂšre46. 29Ă titre dâexemple actuel de la prise en compte de ce second tournant de la justice contemporaine, on peut certainement mentionner le nouvel article 860 du Code judiciaire, tel que modifiĂ© par la loi Pot-pourri I » prĂ©citĂ©e, qui modifie le rĂ©gime des nullitĂ©s procĂ©durales pour y intĂ©grer la notion de grief. Les nullitĂ©s absolues sont assurĂ©ment les ennemies du management. Si la justice est un service public dont lâobjectif est lâefficacitĂ©, comment encore justifier que le non-respect de normes purement formelles, sans aucune incidence sur le principe du contradictoire ou de lâĂ©galitĂ© des armes, puissent entacher la procĂ©dure au point de la dĂ©clarer nulle ? Il ne paraĂźt dĂšs lors plus opportun de tolĂ©rer ces technicalities, pour reprendre le terme anglais. Dâautre part, lâĂ©quilibre des pouvoirs nâimpose pas leur existence. Par consĂ©quent, ce point de rĂ©forme rejoint les aspirations actuelles sans empiĂ©ter sur la sĂ©paration des pouvoirs. Le noyau dur de lâĂ©quilibre des pouvoirs 30Face au mouvement que nous venons dâĂ©voquer se dresse toujours le principe dâĂ©quilibre des pouvoirs, principe gĂ©nĂ©ral de droit. Nul besoin de faire preuve de perspicacitĂ© pour apercevoir la tension potentielle entre ce principe et la conception managĂ©riale de la justice qui peut avoir tendance Ă la rĂ©duire Ă une administration comme les autres. 31En effet, les aspirations actuelles, si louables quâelles soient, ne peuvent pas tout justifier. Pour que soit respectĂ© le principe dâĂ©quilibre des pouvoirs, lâobjectif dâefficacitĂ© de la justice doit composer avec plusieurs axiomes juridiques. Ainsi, le pouvoir judiciaire, dans la droite ligne des thĂ©ories de Publius, doit rester un contrepouvoir afin de prĂ©server lâĂtat de droit et notamment de garantir aux individus lâeffectivitĂ© des droits fondamentaux. Pour ce faire, il convient Ă tout le moins de veiller au maintien de caractĂ©ristiques invariables et propres Ă la justice, Ă savoir lâindĂ©pendance des juges et le principe selon lequel les individus doivent pouvoir accĂ©der Ă un tribunal pour quây soient tranchĂ©s les diffĂ©rends juridiques qui les concernent. Le premier trait est inhĂ©rent au principe de sĂ©paration des pouvoirs et tend finalement Ă garantir des jugements impartiaux ; le second est tout aussi fondamental puisque son absence impliquerait que le pouvoir judiciaire pourrait ĂȘtre privĂ© de ses missions, comme rĂ©sultat dâune disparition du contentieux. 47 Voy. n° 9. 32Ces quelques Ă©lĂ©ments constituent des balises qui sont utiles pour examiner la conformitĂ© de mesures concrĂštes au principe de sĂ©paration ou dâĂ©quilibre des pouvoirs. Elles permettent de tracer la limite de la marge de manĆuvre du lĂ©gislateur dans le domaine judiciaire. En effet, pour autant que lâon accorde une portĂ©e juridique effective au principe de sĂ©paration des pouvoirs, ce qui sâimpose en droit belge47, on doit en dĂ©duire que certaines rĂ©formes pourraient ĂȘtre inconstitutionnelles parce quâelles affectent ledit principe. DĂšs lors, lâexistence dâune volontĂ© du lĂ©gislateur ne suffit pas Ă rendre admissible toute rĂ©forme du systĂšme judiciaire. Ă titre dâexemple, nul nâimagine quâune mesure qui consisterait Ă attribuer au gouvernement fĂ©dĂ©ral un droit de veto sur les dĂ©cisions de la Cour de cassation puisse prĂ©tendre respecter lâĂ©quilibre des pouvoirs et, partant, la Constitution. Dans cette perspective, la suite de notre rĂ©flexion se propose de contribuer Ă dĂ©terminer la mesure dans laquelle le principe de lâĂ©quilibre des pouvoirs peut constituer un argument valable pour sâopposer Ă certaines mesures lĂ©gislatives. III. Concilier les antagonismes 48 La loi du 19 octobre 2015 modifiant le droit de la procĂ©dure civile et portant des dispositions div ... 33Nous proposons de traiter la tension que nous venons de dĂ©crire Ă travers lâexamen de trois problĂ©matiques concrĂštes, dont le choix est inspirĂ© par les rĂ©centes rĂ©formes du pouvoir judiciaire belge, juridiquement concrĂ©tisĂ©es par les lois pots-pourris » 48. Pour chacune dâentre elles, nous verrons que lâon peut soit mettre lâaccent sur la recherche dâefficacitĂ©, soit favoriser le respect dâune conception stricte de la sĂ©paration des pouvoirs. Nous Ă©voquerons ainsi successivement les dichotomies entre contrĂŽle et principe dâindĂ©pendance A, entre judiciarisation et accĂšs au juge B puis entre devoir de rĂ©serve et contrepouvoir C. Nous tenterons de montrer que ces tendances ne sont pas nĂ©cessairement irrĂ©ductibles et quâil est parfois possible de concilier des objectifs a priori antagonistes, Ă condition notamment de privilĂ©gier une vision souple de lâĂ©quilibre des pouvoirs. ContrĂŽle versus IndĂ©pendance 49 Vigour C., Justice lâintroduction dâune rationalitĂ© managĂ©riale comme euphĂ©misation des enjeux ... 34On a vu que le principe dâĂ©quilibre des pouvoirs contenait notamment le principe dâindĂ©pendance du pouvoir judiciaire. Cette indĂ©pendance, dont la principale finalitĂ© consiste Ă garantir une justice impartiale, peut-elle sâaccommoder dâune forme de contrĂŽle exercĂ© sur le pouvoir judiciaire ? Nous pensons que le principe dâĂ©quilibre des pouvoirs ne lâinterdit pas dâune maniĂšre absolue et appelle au contraire Ă ce que chaque pouvoir subisse une forme de surveillance. Certes, un contrĂŽle dâampleur, qui impliquerait la soumission du pouvoir judiciaire, serait inadmissible car elle le priverait de sa facultĂ© dâagir. Ă lâinverse, toutefois, lâabsence de tout contrĂŽle ouvrirait la porte Ă lâarbitraire judiciaire. DĂšs lors, si lâidĂ©e dâun contrĂŽle du travail du magistrat est considĂ©rĂ©e comme souhaitable49, on ne perdra pas de vue quâun contrĂŽle invasif de son activitĂ© ne pourrait ĂȘtre conciliĂ© avec le concept dâĂ©quilibre des pouvoirs. 50 RĂ©vision de la Constitution du 20 novembre 1998, 24 novembre 1998. 51 Krings E., ConsidĂ©rations sur lâĂtat de droit, la sĂ©paration des pouvoirs et le pouvoir judiciaire, ... 35En vertu de lâarticle 151 de la Constitution, insĂ©rĂ© en 1998 dans le contexte de lâaffaire Dutroux50, le pouvoir judiciaire et les juges sont dĂ©sormais sous lâautoritĂ© â plus ou moins contraignante â du Conseil supĂ©rieur de la Justice. Il serait toutefois inexact de penser que les juges nâont Ă©tĂ© soumis Ă aucune forme de contrĂŽle entre la naissance du pays et lâintroduction de cette disposition constitutionnelle. Le Procureur gĂ©nĂ©ral Krings signalait Ă juste titre en 1989 quâune surveillance du pouvoir judiciaire Ă©tait organisĂ©e par la Constitution dĂšs 1831 ; il mentionnait Ă cet Ă©gard lâobligation de motiver article 97 de la Constitution de 1831, la publicitĂ© des audiences articles 96 et 97 et lâexistence de la Cour de cassation article 95 ainsi que la possibilitĂ© pour le Procureur gĂ©nĂ©ral prĂšs la Cour de cassation de se pourvoir dans lâintĂ©rĂȘt de la loi51. On relĂšve cependant que ces diffĂ©rents Ă©lĂ©ments constituent avant tout les rouages dâun systĂšme dâautocontrĂŽle du pouvoir judiciaire, dont la Cour de cassation est la piĂšce maĂźtresse. Les dysfonctionnements ponctuels de la justice dans des dossiers marquants â on songe notamment Ă lâaffaire Fortis â auxquels sâajoute la demande dâefficacitĂ© mentionnĂ©e prĂ©cĂ©demment ont finalement amenĂ© Ă considĂ©rer ces mĂ©canismes comme insuffisants. 52 La loi du 1er dĂ©cembre 2013 portant rĂ©forme des arrondissements judiciaires et modifiant le Code ju ... 53 Philips C., La gestion autonome pour lâorganisation judiciaire atteinte au principe de la sĂ©par ... 36Lâimportante rĂ©forme opĂ©rĂ©e en 2013-2014 doit ĂȘtre examinĂ©e dans ce contexte. Ă travers deux lois importantes, il sâagissait de rationaliser et de simplifier le paysage judiciaire52 et notamment de rendre les juges responsables de la gestion des moyens de fonctionnement gĂ©nĂ©raux qui leur sont allouĂ©s »53. 54 Ibidem. 55 De Leval G., Le printemps de la justice - Actes du colloque du 27 fĂ©vrier 2015 organisĂ© par lâUni ... 56 Cadelli M., Tribune judiciaire â La gestion autonome des entiteÌs judiciaires bienvenue en Ocea ... 57 Voy. Pironnet Q., Droit et dystopies », 2016/2, vol. 77, pp. 363-392. 37Cette rĂ©forme a parfois Ă©tĂ© critiquĂ©e de façon vĂ©hĂ©mente, au motif quâelle instaurerait une vĂ©ritable tutelle » dâun pouvoir sur lâautre, en lâespĂšce de lâexĂ©cutif sur le judiciaire. Lâintroduction des contrats de gestion, qui dĂ©terminent les enveloppes financiĂšres allouĂ©es par le Ministre de la Justice aux diffĂ©rents corps de magistrats en se basant notamment sur une Ă©valuation des performances des acteurs judiciaires, a tout spĂ©cialement suscitĂ© des inquiĂ©tudes en rĂ©fĂ©rence au principe de sĂ©paration des pouvoirs. ClĂ©mence Philips observe ainsi que câest lâexĂ©cutif qui aura la maĂźtrise des contrats de gestion et des moyens de fonctionnement, ainsi que le pouvoir dâannuler des dĂ©cisions prises par les collĂšges »54. Georges de Leval y voit quant Ă lui un pouvoir de direction et de contrĂŽle du pouvoir exĂ©cutif sur une forme de âpolitique judiciaireâ »55. On a Ă©tĂ© jusquâĂ juger quâĂ lâinstar du systĂšme imaginĂ© par G. Orwell, la force de ce systĂšme est de contrĂŽler la pensĂ©e et dâĂ©vincer la contradiction »56. Cette utilisation dâĂ©cole dâun argument ad dystopia57 nous montre les rĂ©ticences farouches du monde judiciaire Ă lâĂ©gard de cette rĂ©forme. 58 15 octobre 2015, n° 138/2015. 38Si lâinquiĂ©tude, face Ă un risque dâempiĂ©tement du pouvoir exĂ©cutif sur le pouvoir judiciaire, paraĂźt lĂ©gitime, nous constatons que la Cour constitutionnelle nâa pas condamnĂ© lâĂ©volution lĂ©gislative. Ă lâoccasion dâun arrĂȘt du 15 octobre 201558, la haute juridiction a examinĂ© la constitutionnalitĂ© de la loi du 18 fĂ©vrier 2014 relative Ă lâintroduction dâune gestion autonome pour lâorganisation judiciaire avec les principes gĂ©nĂ©raux de la sĂ©paration des pouvoirs et de lâindĂ©pendance du pouvoir judiciaire. Le rĂ©sultat est sans appel tous les motifs dâannulation tirĂ©s du principe de sĂ©paration des pouvoirs ont Ă©tĂ© considĂ©rĂ©s comme non fondĂ©s. Cela signifie que la Cour constitutionnelle laisse au lĂ©gislateur une marge dâapprĂ©ciation importante lorsquâil entreprend des rĂ©formes judiciaires, mĂȘme si celles-ci affectent dans une certaine mesure les rapports entre les pouvoirs. 39La rĂ©cente rĂ©forme soulĂšve aussi lâĂ©pineuse question de lâautonomie budgĂ©taire du pouvoir judiciaire, qui entretient Ă©galement des liens avec la rĂ©flexion sur lâĂ©quilibre des pouvoirs. La dĂ©pendance financiĂšre sâanalyse en effet comme une forme de lien de subordination. Une fois encore, il sâagit dâune question de balance et dâĂ©quilibres. Dans cette perspective, il nous semble possible de repĂ©rer deux balises pertinentes pour prĂ©ciser les limites du dĂ©bat. 40Dâune part, la Cour constitutionnelle a pu juger quâ 59 15 octobre 2015, n° 138/2015, Ă obs. F. Georges, La Cour constitutionnelle avali ... [a]ucune disposition constitutionnelle ou conventionnelle ne prĂ©voit que le pouvoir judiciaire doive disposer dâune autonomie financiĂšre et budgĂ©taire. Pareille obligation ne saurait davantage ĂȘtre dĂ©duite du principe gĂ©nĂ©ral de la sĂ©paration des pouvoirs ... La circonstance que dâautres institutions sont financĂ©es au moyen dâune dotation nâoblige pas le lĂ©gislateur Ă financer le pouvoir judiciaire par une dotation »59. 60 Texte disponible Ă lâadresse suivante 61 Gilliaux P., Le droit Ă un tribunal indĂ©pendant et le management dans le procĂšs Ă©quitable », Rev. ... 41Dâautre part, un sous-financement significatif de la justice, qui entraĂźnerait un affaiblissement du pouvoir judiciaire au point quâil ne pourrait plus constituer un contrepouvoir violerait le principe gĂ©nĂ©ral de sĂ©paration des pouvoirs. Pascal Gilliaux rappelle Ă cet Ă©gard, citant la Magna Carta des juges du Conseil consultatif des juges europĂ©ens60, que lâindĂ©pendance des cours et tribunaux doit ĂȘtre assurĂ©e dâun point de vue statutaire, fonctionnel et financier », admettant toutefois que le dernier mot revient aux Ătats, en vertu du principe de subsidiaritĂ©61. 42En dĂ©finitive, on peut penser que la Cour constitutionnelle ne censurerait une rĂšgle qui affecte le budget de la justice que si elle constatait que la mesure induisait une mise sous tutelle du pouvoir judiciaire par lâautoritĂ© politique. En dehors de cette hypothĂšse, le lĂ©gislateur peut prendre des dĂ©cisions qui touchent au financement de la justice sans enfreindre lâĂ©quilibre des pouvoirs ; au regard de la jurisprudence constitutionnelle, sa marge dâapprĂ©ciation paraĂźt â ici aussi â assez large. Juridiciarisation versus AccĂšs au juge 62 Hubert G., Les dĂ©placements des frontiĂšres de la justice vers une nouvelle cartographie de la g ... 63 Ibidem. 64 Ibidem. 43Le mouvement qui secoue la sociĂ©tĂ© belge contemporaine â et europĂ©enne en gĂ©nĂ©ral â est un mouvement profond et repĂ©rable. Câest ce que GaĂ«lle Hubert appelle le double processus de juridicisation et judiciarisation du lien social »62. Dâune part, on assiste Ă une montĂ©e en puissance de lâentrĂ©e du droit dans tous les domaines de la vie sociale. Des problĂšmes intrafamiliaux au droit de la consommation de masse, il nâest aucun pan des relations humaines qui ne doive dĂ©sormais faire lâobjet de son corpus normatif propre. LâidĂ©e de lâabsence de cadre juridique, assimilable Ă une peur du chaos dĂ©structurant, devient insupportable Ă lâĂȘtre humain contemporain, ce qui, par le repli sur les textes et les procĂ©dures, [permet] de se dĂ©gager de ses responsabilitĂ©s ou de faire porter sur les cadres juridiques et techniques le poids de dĂ©cisions peu agrĂ©ables Ă prendre »63. Dâautre part, et corrĂ©lativement, la demande de rĂšglement des litiges, quels quâils soient, devant une instance judiciaire, ne cesse de croĂźtre et on assiste Ă une explosion du judiciaire »64. Le juge est davantage sollicitĂ©, cependant quâil dispose Ă bien des Ă©gards toujours des mĂȘmes moyens et prĂ©rogatives quâautrefois. Face Ă ce constat, deux voies sont thĂ©oriquement envisageables la premiĂšre â qui nâest sans doute pas assez suivie â consiste Ă augmenter lâoffre judiciaire, en renforçant le cadre de la magistrature et les outils dont elle dispose pour mener ses missions, afin de sâadapter Ă la croissance de la demande. La seconde se focalise davantage sur la demande et, Ă dĂ©faut de pouvoir la rĂ©duire, cherche Ă la dĂ©vier en dĂ©veloppant des moyens alternatifs de rĂ©solution des litiges. 65 Le droit Ă lâaccĂšs Ă un juge est un des droits les plus fondamentaux tirĂ©s lâarticle 6 sa ... 66 Voy. aussi en ce sens Muller F., La Cour de cassation belge Ă l'aune des rapports entre pouvoirs ... 44Face Ă cette derniĂšre tendance, se pose la question du droit Ă lâaccĂšs Ă un tribunal. Il y a en effet lieu de se demander sâil nâest pas portĂ© atteinte Ă ce droit Ă chaque fois quâune prĂ©rogative est soustraite aux juges judiciaires pour ĂȘtre confiĂ©e Ă une autre instance, surtout si celle-ci est davantage soumise Ă lâinfluence potentielle du pouvoir exĂ©cutif. Le droit dâaccĂ©der Ă un juge est certes explicitement consacrĂ© notamment par lâarticle 6 de la Convention europĂ©enne des droits de lâhomme65, mais il est aussi intrinsĂšquement liĂ© Ă lâĂ©quilibre des pouvoirs, dont il contribue Ă assurer lâeffectivitĂ©. En effet, le pouvoir judiciaire, aussi indĂ©pendant et impartial quâil puisse ĂȘtre, nâa de rĂŽle effectif que si, par la disposition des choses, on lui assure que, dans une certaine mesure au moins, le contentieux lui est rĂ©servĂ©. En tout Ă©tat de cause, un particulier doit ĂȘtre en mesure de faire valoir en justice ses prĂ©tentions. Ă cet Ă©gard, les articles 144 et 145 de la Constitution fixent les tĂąches dĂ©volues aux cours et tribunaux, qui ne peuvent en ĂȘtre dĂ©possĂ©dĂ©s, en raison de la sĂ©paration des pouvoirs66. Câest la raison de lâinterrogation suivante dans quelle mesure le droit Ă lâaccĂšs au juge limite-t-il la marge de manĆuvre du lĂ©gislateur dans ses projets qui visent Ă rĂ©agir Ă la judiciarisation ? 45Ă cet Ă©gard, les diffĂ©rentes lois dites Pots-pourri », dĂ©jĂ Ă©voquĂ©es, constituent un terrain pertinent pour des analyses concrĂštes et actuelles. Trois types de mesures nous semblent particuliĂšrement intĂ©ressantes et retiendront notre attention dans les lignes qui suivent. 67 Voy. Berthe A., Lâinjonction de payer, Bruxelles, Larcier, Ă paraĂźtre en 2017. 46En premier lieu, nous pensons Ă la dĂ©volution aux huissiers de justice du traitement des crĂ©ances non contestĂ©es. Lâarticle 519, §1er, 1°bis, du Code judiciaire, qui concerne les missions des huissiers de justice a Ă©tĂ© modifiĂ© par la loi Pot-pourri I » afin dây intĂ©grer Le recouvrement des dettes dâargent non contestĂ©es conformĂ©ment au chapitre Iquinquies du titre 1er de la cinquiĂšme partie ». Si lâon mesure bien lâintĂ©rĂȘt pratique de cette rĂ©forme, qui favorise une rĂ©duction de lâarriĂ©rĂ© judiciaire et facilite la rĂ©cupĂ©ration de sommes dues67, nous pensons quâelle soulĂšve la question de lâaccĂšs au juge en raison de lâinversement du contentieux et du report corrĂ©latif dans le temps de lâĂ©ventuelle contestation du dĂ©biteur. La matiĂšre nâest pas encore mise en Ćuvre mais il est Ă©vident que lâĂ©ventuelle friction avec le principe de lâĂ©quilibre des pouvoirs et lâaccĂšs au juge tiendra Ă la dĂ©finition et Ă lâapprĂ©ciation du caractĂšre contestĂ© » ou non des crĂ©ances visĂ©es. 68 Article 216bis du Code dâinstruction criminelle, tel que modifiĂ© par la loi du 14 avril 2011 ... 69 2 juin 2016, n° 83/2016, 47En second lieu, on peut pointer le cas de la transaction pĂ©nale. On rappelle quâune loi de 2011 a Ă©tendu le champ dâapplication et revu les modalitĂ©s de la transaction pĂ©nale, mĂ©canisme qui permet au Parquet de dĂ©cider de mettre fin, dans certains cas, Ă des poursuites â câest-Ă -dire dâĂ©teindre lâaction publique â Ă la condition quâune somme dâargent soit versĂ©e par lâauteur de faits punissables au TrĂ©sor public68. Il y a, dans cette mesure, une forme de justice nĂ©gociĂ©e, puisque le concernĂ© reçoit une offre du MinistĂšre public qui, sâil lâaccepte et paie le montant proposĂ© dans le dĂ©lai imparti, le dispense de subir un procĂšs dont lâissue est incertaine. La Cour constitutionnelle, appelĂ©e Ă examiner ce mĂ©canisme, a cependant considĂ©rĂ© quâon ne pouvait pas admettre que le rĂŽle du juge soit confinĂ© Ă un simple contrĂŽle de lĂ©galitĂ©69. Selon la haute juridiction, il sâagit dâune atteinte au principe du procĂšs Ă©quitable et la disposition lĂ©gale est dĂšs lors dĂ©clarĂ©e inconstitutionnelle. 70 Article 216 du Code dâinstruction criminelle, tel que modifiĂ© par la loi du 5 fĂ©vrier 2016 1 ... 71 Voy. not. Cour eur. dr. h., Natsvlishvili et Togonidze c. GĂ©orgie, 29 avril 2014, 48Enfin, Ă titre de troisiĂšme illustration, nous proposons dâĂ©voquer la dĂ©claration prĂ©alable de culpabilitĂ©. Cette procĂ©dure semble sâinspirer de la technique du plaider coupable » guilty plea qui est rĂ©pandue dans le droit anglo-saxon. Le nouveau systĂšme belge permet au Procureur du Roi, pour un grand nombre dâinfractions, de proposer des peines infĂ©rieures Ă celles quâil estime devoir requĂ©rir Ă lâĂ©gard dâun suspect ou dâun prĂ©venu qui reconnaĂźt dans une dĂ©claration officielle quâil est coupable des faits qui lui sont imputĂ©s70. Quand cette technique est utilisĂ©e, le juge du fond doit certes encore intervenir, mais sa tĂąche se borne Ă homologuer lâaccord conclu entre le Parquet et lâauteur des faits punissables, aprĂšs avoir vĂ©rifiĂ© sâil satisfait Ă certaines conditions. MalgrĂ© les rĂ©ticences quâil suscite, ce systĂšme, qui existe depuis longtemps dans les pays de common law, ne viole pas, du moins dans son principe, la Convention europĂ©enne des droits de lâhomme71. La limite de ce qui est juridiquement acceptable serait franchie sâil nâexistait aucun recours effectif Ă un juge compĂ©tent pour vĂ©rifier si le justiciable a, en pleine connaissance de cause, marquĂ© son consentement sur cette procĂ©dure raccourcie. Dans cette hypothĂšse, en effet, le Parquet â qui peut ĂȘtre soumis Ă une certaine influence du pouvoir exĂ©cutif â pourrait inflĂ©chir seul le contentieux dĂ©volu au pouvoir judiciaire, ce qui porterait atteinte Ă lâĂ©quilibre des pouvoirs. Devoir de rĂ©serve versus Contrepouvoir 49AprĂšs lâanalyse des deux antagonismes prĂ©cĂ©dents, il convient de revenir Ă notre rĂ©fĂ©rence initiale, faite au discours tĂ©lĂ©visĂ© retentissant du Premier PrĂ©sident de la Cour de cassation. Quel serait lâintĂ©rĂȘt de mettre en exergue ces potentielles violations de lâĂ©quilibre des pouvoirs si les premiers concernĂ©s par les rĂ©formes judiciaires Ă©taient contraints au silence ? Cet Ă©quilibre des pouvoirs resterait lettre morte si un certain droit Ă la parole nâexistait pour chacun dâentre eux. Ceci nous mĂšne par consĂ©quent Ă notre troisiĂšme antagonisme, intrinsĂšquement liĂ© aux deux premiers. Si lâon prend comme repĂšre le principe de lâĂ©quilibre des pouvoirs, il sâagit de maintenir le pouvoir judiciaire en position de contrepouvoir, pouvant le cas Ă©chĂ©ant sâexprimer contre des rĂ©formes initiĂ©es par les pouvoirs lĂ©gislatif et exĂ©cutif. Si, en revanche, on vise prioritairement lâefficacitĂ© de la justice, il sâagit peut-ĂȘtre de contrĂŽler la libertĂ© dâexpression des juges et de leurs reprĂ©sentants, au nom dâune conception strict de leur devoir de rĂ©serve. 72 Cass. ass. gĂ©n., 9 septembre 1999, Pas., 1999, I, p. 1102, citĂ© par Kuty F., Le devoir de rĂ©ser ... 50On analyse classiquement le devoir de rĂ©serve comme un principe qui prescrit au juge de sâabstenir de tout acte ou comportement de nature Ă Ă©branler la confiance du justiciable ou Ă donner lâimpression quâil ne serait plus indĂ©pendant ou impartial »72. Contrairement au mandataire politique, Ă©lu par la population et dĂ©positaire, Ă ce titre, dâune lĂ©gitimitĂ© dĂ©mocratique, le magistrat est vu, on lâa dit, comme la bouche de la loi ». Ă cet Ă©gard, il doit se garder dâentrer dans lâarĂšne. 73 Kuty F., op. cit., p. 269. 51Il importe de ne pas confondre la violation du devoir de rĂ©serve avec lâobligation dâimpartialitĂ© du juge, sur laquelle nous reviendrons. Celle-ci est inhĂ©rente, on lâa vu, au principe gĂ©nĂ©ral de droit de sĂ©paration des pouvoirs. Le droit de rĂ©serve est plutĂŽt Ă apprĂ©cier comme une prĂ©caution de prudence que le juge se doit de maintenir en toute circonstance, quâil soit ou non dans lâexercice de sa fonction de juger. Toutefois, ceci dĂ©pend des propos tenus, du contexte et du moment auquel ils ont Ă©tĂ© exprimĂ©s »73. 74 Cadelli M., Du devoir de rĂ©serve des magistrats aux vertus dâindignation et de courage », 2 ... 75 Mandoux P. et Vandermeersch D., Le point de vue du magistrat », in Le devoir de rĂ©serve lâexpre ... 52La tension est rĂ©sumĂ©e par les questions suivantes. Ă partir de quel moment le droit de rĂ©serve cĂšde-t-il devant la nĂ©cessitĂ© de prĂ©server lâindĂ©pendance du pouvoir judiciaire, prĂ©rogative nĂ©cessaire Ă son rĂŽle de contrepouvoir ? Peut-on considĂ©rer quâil existe Ă lâopposĂ© du devoir de rĂ©serve un droit dâindignation » du magistrat74, ou un devoir dâintervention »75 ? 76 Cour eur. dr. h., Koudechkina c. Russie, 26 fĂ©vrier 2009. 77 Delgrange X. et Lagasse N., La libertĂ© dâexpression du juge Comment descendre de sa tour dâivoi ... 53La Cour europĂ©enne des droits de lâhomme a prononcĂ© Ă cet Ă©gard un arrĂȘt intĂ©ressant en 200976. En lâespĂšce, il sâagissait dâun magistrat russe, Mme Koudechkina, rĂ©voquĂ©e de la magistrature en 2004 au motif quâelle avait accusĂ© publiquement des hauts magistrats dâexercer des pressions sur elle au sujet dâune importante affaire pĂ©nale. La Cour rappelle que les magistrats bĂ©nĂ©ficient bel et bien de la protection de lâarticle 10 de la Convention â consacrant la libertĂ© dâexpression â, qui sâĂ©tend Ă la sphĂšre professionnelle, tout en rappelant que la divulgation dâinformations obtenues dans le cadre de leur travail, mĂȘme sur des questions dâintĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral, doit toujours ĂȘtre apprĂ©ciĂ©e Ă la lumiĂšre de leur devoir de loyautĂ© et de discrĂ©tion. La Russie est donc condamnĂ©e pour la rĂ©vocation du magistrat, sanction jugĂ©e trop sĂ©vĂšre, et de nature Ă avoir un âeffet inhibiteurâ sur les juges souhaitant participer au dĂ©bat public sur le fonctionnement des institutions judiciaires »77. 78 Guide pour les magistrats, approuvĂ© par lâassemblĂ©e gĂ©nĂ©rale du Conseil consultatif de la magistrat ... 54Dans le prolongement de cette ouverture europĂ©enne, le Guide pour les magistrats, adoptĂ© en 2012 par le Conseil supĂ©rieur de la Justice, contient en son point 4 concernant la rĂ©serve et la discrĂ©tion du magistrat la mention suivante [l]orsque la dĂ©mocratie et les libertĂ©s fondamentales sont en pĂ©ril, la rĂ©serve cĂšde devant le droit dâindignation »78. On sait toutefois que ce texte nâa quâun poids tout relatif et sâapparente Ă de la soft law. 55Le pouvoir arrĂȘtant le pouvoir » de Montesquieu, les freins et contrepoids de Publius, nous amĂšnent Ă voir dâun bon Ćil la facultĂ© dâautoriser lâexception au devoir de rĂ©serve. La sortie mĂ©diatique du Premier PrĂ©sident de la Cour de cassation, Ă cet Ă©gard, relĂšve selon nous de cette facultĂ©. Conclusion 79 Proc. gĂ©n. F. Dumon, Le Pouvoir Judiciaire. Cet inconnu et ce mĂ©connu », op. cit., pp. 457-474. 56Le principe de la sĂ©paration des pouvoirs nâest pas un simple objet de design institutionnel ; il sâagit dâune rĂšgle fondamentale pleinement dirigĂ©e vers lâintĂ©rĂȘt de la sociĂ©tĂ© et des individus qui la composent. De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, la rĂšgle contribue Ă assurer lâeffectivitĂ© des libertĂ©s face au risque dâabus de lâautoritĂ© publique ; dans le domaine particulier de la justice, elle est le socle de lâindĂ©pendance judiciaire qui, Ă son tour, est un vecteur indispensable de lâimpartialitĂ© et donc de la jouissance effective des droits et libertĂ©s. Pour ces raisons, les atteintes qui sont portĂ©es au principe sont suspectes et suscitent des craintes lĂ©gitimes. En effet, [n]ier la rĂ©alitĂ© de la sĂ©paration des Pouvoirs, spĂ©cialement en ce qui concerne le Pouvoir judiciaire, câest nier lâexistence de la justice »79. 57Le principe en cause ne doit cependant pas ĂȘtre compris comme un obstacle Ă toute rĂ©forme du systĂšme judiciaire ou comme un moyen de justifier la stagnation des institutions. Dâune part, la rĂšgle nâa pas la portĂ©e absolue quâon lui prĂȘte parfois plutĂŽt quâune sĂ©paration â au sens strict du terme â, elle impose un Ă©quilibre des pouvoirs, câest-Ă -dire un systĂšme institutionnel oĂč il existe des mĂ©canismes de contrĂŽle mutuels aptes Ă empĂȘcher lâarbitraire. Ă ce titre, il ne semble donc pas indispensable de rechercher Ă ce que le pouvoir judiciaire bĂ©nĂ©ficie dâune autonomie parfaite et radicale par rapport aux autres pouvoirs. Dâautre part, la volontĂ© dâatteindre des objectifs qui sont lĂ©gitimes â car utiles Ă lâintĂ©rĂȘt collectif â peut contribuer Ă justifier certains Ă©carts par rapport Ă lâidĂ©al incarnĂ© par une sĂ©paration stricte des pouvoirs ; ce peut notamment ĂȘtre le cas du vĆu politique de renforcer lâefficacitĂ© du systĂšme judiciaire, spĂ©cialement pour faire face Ă la demande croissante des justiciables. 58Il convient donc dâapprĂ©cier les rĂ©formes avec mesure en recourant, comme souvent, au principe de proportionnalitĂ©. LâĂ©quilibre des pouvoirs peut survivre Ă des rĂšgles qui libĂšrent les juges de certaines tĂąches afin quâils puissent mieux se concentrer sur leurs missions essentielles ; il succombe en revanche Ă celles qui, en dĂ©finitive, reviennent Ă priver le justiciable de la possibilitĂ© dâaccĂ©der Ă un juge impartial pour trancher tout litige relatif Ă des droits civils. Haut de page Notes 1 De Mulder V., La Belgique se rapproche dâun Ătat voyou, pour le plus haut magistrat du pays », 15 mai 2016, disponible Ă lâadresse suivante consultĂ© le 1er janvier 2017. 2 Somers P., Le printemps de la justice - Actes du colloque du 27 fĂ©vrier 2015 organisĂ© par lâUnion professionnelle de la Magistrature », Ius & Actores, 2015/2, p. 10. 3 Pariente A. dir., La sĂ©paration des pouvoirs â ThĂ©orie contestĂ©e et pratique renouvelĂ©e, Paris, Dalloz, p. 3. 4 Voy. en particulier le chapitre 12 du DeuxiĂšme TraitĂ©. 5 Locke J., Deux traitĂ©s de gouvernement civil 1690, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, 1997, p. 219. 6 Locke J., p. 220. 7 Montesquieu, p. 206. 8 Ibid., p. 208. 9 Ibid., p. 216. 10 Ibid., p. 212. 11 Lambert E., Le Gouvernement des juges, Paris, Giard, 1921, pp. 4-5. 12 Voy. le titre VIII de la Constitution de la RĂ©publique française. 13 DelpĂ©rĂ©e F., La sĂ©paration des pouvoirs, aujourdâhui », 1990, p. 126. 14 Hamilton A., Jay J. et Madison J., Le FĂ©dĂ©raliste 1788, Paris, Classiques Garnier, 2012, p. 379. 15 Hamilton A., Jay J. et Madison J., p. 381, câest nous qui soulignons. 16 Pour une analyse des oppositions, voy. Manin B., FrontiĂšres, freins et contrepoids la sĂ©paration des pouvoirs dans le dĂ©bat constitutionnel amĂ©ricain de 1787 », Revue française de science politique, n°2, 1994, pp. 257-293. 17 Hamilton A., Jay J. et Madison J., p. 390, câest nous qui soulignons. 18 Wodon L., ConsidĂ©rations sur la sĂ©paration et la dĂ©lĂ©gation des pouvoirs en droit public belge, Bruxelles, AcadĂ©mie Royale de Belgique, 1942, p. 19. 19 Pour une plus ample analyse, voy. Behrendt C. et Bouhon F., Introduction Ă la thĂ©orie gĂ©nĂ©rale de lâĂtat - Manuel, 3e Ă©d., Bruxelles, Larcier, 2014, pp. 161-166. 20 Behrendt C. et Bouhon F., p. 165. 21 Huyttens Ă., Discussions du CongrĂšs national de Belgique 1830-1831, Bruxelles, SociĂ©tĂ© typographique belge, Tome IV, PiĂšce justificative n° 53, p. 68. Câest nous qui soulignons. 22 Voy. le n° 8. 23 On peut cependant considĂ©rer quâune conception plus rigide a pu prĂ©valoir et avoir des implications concrĂštes considĂ©rables. On peut ainsi se rappeler que câest au nom de cette conception mĂ©taphysique du pouvoir souverain » en trois personnes qui travestissait et les idĂ©es de Montesquieu et lâesprit de la Constitution que les Cours et Tribunaux belges avaient consacrĂ© la thĂ©orie de lâimmunitĂ© de la puissance publique, du Pouvoir ExĂ©cutif, de lâAdministration » Philippart R., SĂ©paration des Pouvoirs - discours prononcĂ© Ă la sĂ©ance solennelle de rentrĂ©e de la ConfĂ©rence libre du Jeune Barreau de LiĂšge, LiĂšge, Imp. H. Vaillant-Carmanne S. A., 16 novembre 1946, p. 7. 24 Alen A., SĂ©paration ou collaboration des pouvoirs ? », 1990, pp. 221-236, ici p. 222 ; Lemmens P., The Independence of Judiciary in Belgium », in Effectiveness of judicial protection and the constitutional order. Belgian report at the II International Congress of Procedural Law, Deventer, Kluwer, 1983, pp. 49-82, ici p. 51. 25 Conclusions devant Cass., 7 mars 1963, Pas., 1963, I, p. 750. 26 Ceci semble sâopposer Ă la thĂšse de Ch. Faider, qui considĂšre que le pouvoir judiciaire est en quelque sorte infĂ©odĂ© aux deux autres, qui sont prĂ©pondĂ©rants F. Muller, La Cour de cassation belge Ă l'aune des rapports entre pouvoirs de sa naissance dans le modĂšle classique de la sĂ©paration des pouvoirs Ă l'aube d'une extension de la fonction juridictionnelle, Bruges, La Charte, 2011, p. 287. 27 Lemmens P., The Independence of Judiciary in Belgium », in Effectiveness of judicial protection and the constitutional order. Belgian report at the II International Congress of Procedural Law, Deventer, Kluwer, 1983, pp. 49-82, ici pp. 49 et s. ; W. Ganshof van der Meersch, Propos sur le texte de la loi et les principes gĂ©nĂ©raux du droit », 1970, pp. 557-573 et 581-596, ici pp. 583-584 28 15 octobre 2015, n° 138/2015, Voy. aussi 31 mai 2011, n° 99/2011, et 24 mars 2016, n° 48/2016, la sĂ©paration des pouvoirs nâautorise [âŠ] toutefois le lĂ©gislateur dĂ©crĂ©tal Ă modifier rĂ©troactivement lâordre juridique sans quâil soit dĂ©montrĂ© quâil existe des circonstances exceptionnelles ou des motifs impĂ©rieux dâintĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral ». 29 La question sâest posĂ©e de savoir si le principe avait une valeur constitutionnelle, ou seulement lĂ©gislative. La seconde hypothĂšse implique que le lĂ©gislateur peut lui-mĂȘme dĂ©roger au principe qui ne sâimpose pas Ă lui. Cette conception semble ĂȘtre celle que la Section de lĂ©gislation du Conseil dâĂtat a exprimĂ©e en 1989 il est indĂ©niable que la sĂ©paration des pouvoirs est lâun des fondements de notre systĂšme institutionnel, et singuliĂšrement de la rĂ©partition des fonctions de lâĂtat entre des pouvoirs qui, lâun par rapport Ă lâautre, sont dotĂ©s chacun dâune certaine autonomie dans lâexercice des fonctions de lĂ©gislation, dâadministration et de juridiction. ⊠Câest ⊠au lĂ©gislateur quâil appartient, en premier lieu, avec la reprĂ©sentativitĂ© dans laquelle il puise sa lĂ©gitimitĂ© finale, de dĂ©terminer la portĂ©e prĂ©cise en droit positif du principe de la sĂ©paration des pouvoirs, compte tenu des nĂ©cessitĂ©s du prĂ©sent et des conceptions prĂ©dominantes » Avis du 3 octobre 1989, Doc. Parl., Ch. repr., 1988-89, n° 675/2, points et La Cour constitutionnelle et la Cour de cassation ont en revanche affirmĂ© le caractĂšre constitutionnel du principe voir not. 3 avril 2014, n° 57/2014, et Cass., 22 mai 1987, Pas., I, p. 1177. Avec dâautres auteurs, nous pensons aussi que [l]a sĂ©paration des pouvoirs est un principe constitutionnel. Son sens et sa portĂ©e ne peuvent donc se dĂ©duire que de la Constitution elle-mĂȘme et non des dĂ©cisions nouvelles que prendrait le Pouvoir lĂ©gislatif. Ce principe constitutionnel signifie, nĂ©cessairement, Ă peine de le vider de sa substance, que le Pouvoir lĂ©gislatif ne possĂšde par une suprĂ©matieâ ⊠à lâĂ©gard du Pouvoir judiciaire qui lui permettrait de contrĂŽler celui-ciâ » Ganshof van der Meersch W., Delange R., Dumon F. et Charles R., Ă propos de lâindĂ©pendance du pouvoir judiciaire », 1990, pp. 423-426. 30 26 novembre 2011, n° 186/2009, 31 12 novembre 2011, n° 67/92, 32 22 juillet 2004, n° 136/2004, Voy. Ă©g. Rosoux G., Vers une dĂ©matĂ©rialisation » des droits fondamentaux ? Convergence des droits fondamentaux dans une protection fragmentĂ©e, Ă la lumiĂšre du raisonnement du juge constitutionnel belge, thĂšse LiĂšge, 2014, Bruxelles, Bruylant, 2015, pp. 148-164. 33 Cass., 4 septembre 2014, Pas., 2014, pp. 1731-1740. 34 Cass., 8 mai 2012, comm. H. Lamont, Juristenkrant, 16 mai 2012, pp. 10 et 11. 35 Alen A. , SĂ©paration ou collaboration des pouvoirs ? », 1990, pp. 221-236, ici pp. 231-232. Pour le dire autrement [d]e scheiding der machten betekent eerst en vooral dat men het recht heeft op een onpartijdige en onafhankelijke rechter die door de wet is aangesteld. » Interview de M. Storme, Juristenkrant, 14 janvier 2009, p. 8. Voy. aussi DelpĂ©rĂ©e F., Propos sur la justice, ici et là », in Liber Amicorum Prof. Em. E. Krings, Bruxelles, Story-Scientia, 1991, pp. 531-539, ici p. 531. Le mĂȘme auteur, dans une autre contribution, affirme que la doctrine de la sĂ©paration des pouvoirs est essentiellement conçue comme le moyen de garantir lâindĂ©pendance des cours et tribunaux » DelpĂ©rĂ©e F., La sĂ©paration des pouvoirs, aujourdâhui », 1990, pp. 126-131, ici pp. 126-127. 36 Nous pensons en particulier au principe de nomination Ă vie et Ă la rĂšgle dâinamovibilitĂ© des juges article 152 de la Constitution, mais aussi au fait que le traitement des juges est fixĂ© par la loi article 154 de la Constitution et que des rĂšgles dâincompatibilitĂ© sont imposĂ©es article 155 de la Constitution. 37 Grandjean G. et Wildemeersch J. dir., Les juges dĂ©cideurs politiques ? Essais sur le pouvoir politiques des juges dans lâexercice de leur fonction, Bruxelles, Bruylant, 2016, 371 p. 38 Voy. François L. et Thirion N., Les juges dans la politique », in Grandjean G. et Wildemeersch J. dir., Les juges dĂ©cideurs politiques ? Essais sur le pouvoir politiques des juges dans lâexercice de leur fonction, Bruxelles, Bruylant, 2016, pp. 53-77. 39 Vigour C., Justice lâintroduction dâune rationalitĂ© managĂ©riale comme euphĂ©misation des enjeux politiques », Droit et sociĂ©tĂ©, 2/2006 n°63-64, p. 429. 40 Ibidem. 41 Ibid., p. 426. 42 Voy. Jacob R., La grĂące des juges, lâinstitution judiciaire et le sacrĂ© en Occident, Paris, PUF, 2014, 516 p. 43 Munungu Lungungu K., Chapitre 4 le management judiciaire ou le glas de lâindĂ©pendance du juge ? un Ă©clairage de droit constitutionnel », in Le management judiciaire ou le glas de l'indĂ©pendance du juge ? Un Ă©clairage de droit constitutionnel, Rev. Dr. ULB, 2014, n° 41, p. 126. 44 Doc. parl., Chambre, sess. 2014-2015, n° 54 1219/001, p. 3. 45 Verougstraete I., Comment travailler vite et bien et pour peu d'euros », 2015, p. 153. 46 Et ce sous la forme dâune satisfaction Ă©quitable » aux termes de lâarticle 41 de la Convention. Celle-ci est calculĂ©e en Ă©quitĂ©, en fonction de l'ensemble des circonstances pertinentes, mais consiste en pratique en une forme de rĂ©paration intĂ©grale Sohier J., Lâaction en responsabilitĂ© contre des pouvoirs publics aÌ porter devant les juridictions judiciaires ou, depuis 2014, devant le conseil dâĂtat ? », 2015, n°15138. 47 Voy. n° 9. 48 La loi du 19 octobre 2015 modifiant le droit de la procĂ©dure civile et portant des dispositions diverses en matiĂšre de justice, 22 octobre 2015, dite pot-pourri I » dĂ©nomination dont nous ferons usage ci-aprĂšs ; la loi du 5 fĂ©vrier 2016 modifiant le droit pĂ©nal et la procĂ©dure pĂ©nale et portant des dispositions diverses en matiĂšre de justice 19 fĂ©vrier 2016, dite pot-pourri II » dĂ©nomination dont nous ferons usage ci-aprĂšs ; la loi du 4 mai 2016 relative Ă lâinternement et Ă diverses dispositions en matiĂšre de Justice, 13 mai 2016, dite pot-pourri III » dĂ©nomination dont nous ferons usage ci-aprĂšs ; La loi du 25 dĂ©cembre 2016 modifiant le statut juridique des dĂ©tenus et la surveillance des prisons et portant des dispositions diverses en matiĂšre de justice, 30 dĂ©cembre 2016, dite pot-pourri IV » dĂ©nomination dont nous ferons usage ci-aprĂšs. 49 Vigour C., Justice lâintroduction dâune rationalitĂ© managĂ©riale comme euphĂ©misation des enjeux politiques », Droit et sociĂ©tĂ©, 2/2006 n°63-64, p. 432. 50 RĂ©vision de la Constitution du 20 novembre 1998, 24 novembre 1998. 51 Krings E., ConsidĂ©rations sur lâĂtat de droit, la sĂ©paration des pouvoirs et le pouvoir judiciaire, Bruxelles, Bruylant, 1989, pp. 30-31. 52 La loi du 1er dĂ©cembre 2013 portant rĂ©forme des arrondissements judiciaires et modifiant le Code judiciaire en vue de renforcer la mobilitĂ© des membres de lâordre judiciaire, 12 dĂ©cembre 2013 ; et la loi du 18 fĂ©vrier 2014 relative Ă lâintroduction dâune gestion autonome pour lâorganisation judiciaire, 4 mars 2014. 53 Philips C., La gestion autonome pour lâorganisation judiciaire atteinte au principe de la sĂ©paration des pouvoirs ? », Bulletin social & juridique, avril 2014, p. 2. 54 Ibidem. 55 De Leval G., Le printemps de la justice - Actes du colloque du 27 fĂ©vrier 2015 organisĂ© par lâUnion professionnelle de la Magistrature », Ius & Actores, 2015/2, p. 69. 56 Cadelli M., Tribune judiciaire â La gestion autonome des entiteÌs judiciaires bienvenue en Oceania », 2014, p. 795. 57 Voy. Pironnet Q., Droit et dystopies », 2016/2, vol. 77, pp. 363-392. 58 15 octobre 2015, n° 138/2015. 59 15 octobre 2015, n° 138/2015, Ă obs. F. Georges, La Cour constitutionnelle avalise dans une trĂšs large mesure la rĂ©forme âTurtelboomâ », 2015, pp. 1789-1792. 60 Texte disponible Ă lâadresse suivante 61 Gilliaux P., Le droit Ă un tribunal indĂ©pendant et le management dans le procĂšs Ă©quitable », Rev. dr. 2014/1-2, p. 86. 62 Hubert G., Les dĂ©placements des frontiĂšres de la justice vers une nouvelle cartographie de la gestion des risques ? », Pyramides [En ligne], 11/2006, disponible Ă lâadresse suivante consultĂ© le 17 janvier 2017, p. 7. Câest lâauteur qui souligne. 63 Ibidem. 64 Ibidem. 65 Le droit Ă lâaccĂšs Ă un juge est un des droits les plus fondamentaux tirĂ©s lâarticle 6 sans lequel la Convention cesserait dâĂȘtre effective arrĂȘt Golder du 21 fĂ©vrier 1975. On en dĂ©duit Ă©galement le droit pour un justiciable sans moyens de disposer de lâassistance judiciaire arrĂȘt Airey du 9 octobre 1979 ou le droit dâobtenir lâexĂ©cution des jugements prononcĂ©s arrĂȘt Hornsby du 1er avril 1998. 66 Voy. aussi en ce sens Muller F., La Cour de cassation belge Ă l'aune des rapports entre pouvoirs de sa naissance dans le modĂšle classique de la sĂ©paration des pouvoirs Ă l'aube d'une extension de la fonction juridictionnelle, Bruges, La Charte, 2011, pp. 45 et s. Ă toutes fins utiles, nous rappelons que les articles 144 et 145 de la Constitution attribuent aux cours et tribunaux toutes contestations qui ont pour objet des droits civils, sans possibilitĂ© pour le lĂ©gislateur de dĂ©roger Ă cette rĂšgle, ainsi que les contestations qui ont pour objet des droits politiques, sauf â dans ce second cas â les exceptions Ă©tablies par la loi. 67 Voy. Berthe A., Lâinjonction de payer, Bruxelles, Larcier, Ă paraĂźtre en 2017. 68 Article 216bis du Code dâinstruction criminelle, tel que modifiĂ© par la loi du 14 avril 2011 6 mai 2011. Cette disposition doit cependant ĂȘtre lue Ă la lumiĂšre de lâarrĂȘt n° 83/2016 de la Cour constitutionnelle, qui met partiellement en cause le systĂšme. 69 2 juin 2016, n° 83/2016, 70 Article 216 du Code dâinstruction criminelle, tel que modifiĂ© par la loi du 5 fĂ©vrier 2016 19 fĂ©vrier 2016. 71 Voy. not. Cour eur. dr. h., Natsvlishvili et Togonidze c. GĂ©orgie, 29 avril 2014, 72 Cass. ass. gĂ©n., 9 septembre 1999, Pas., 1999, I, p. 1102, citĂ© par Kuty F., Le devoir de rĂ©serve du magistrat dans ses relations avec la presse », 2005, p. 268. 73 Kuty F., op. cit., p. 269. 74 Cadelli M., Du devoir de rĂ©serve des magistrats aux vertus dâindignation et de courage », 2013, pp. 297-305. 75 Mandoux P. et Vandermeersch D., Le point de vue du magistrat », in Le devoir de rĂ©serve lâexpression censurĂ©e ?, coll. Les Cahiers de lâInstitut dâĂ©tudes sur la Justice, n° 5, Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 44. 76 Cour eur. dr. h., Koudechkina c. Russie, 26 fĂ©vrier 2009. 77 Delgrange X. et Lagasse N., La libertĂ© dâexpression du juge Comment descendre de sa tour dâivoire en demeurant au-dessus de la mĂȘlĂ©e ? », in Englebert J. dir., Questions de droit judiciaire inspirĂ©es de lâ Affaire Fortis », Bruxelles, Larcier, 2011, p. 218. 78 Guide pour les magistrats, approuvĂ© par lâassemblĂ©e gĂ©nĂ©rale du Conseil consultatif de la magistrature le 25 juin 2012 et approuvĂ© par lâassemblĂ©e gĂ©nĂ©rale du Conseil supĂ©rieur de la Justice le 27 juin 2012, disponible Ă lâadresse suivante 79 Proc. gĂ©n. F. Dumon, Le Pouvoir Judiciaire. Cet inconnu et ce mĂ©connu », op. cit., pp. de page Pour citer cet article RĂ©fĂ©rence papier FrĂ©dĂ©ric Bouhon et Quentin Pironnet, Le pouvoir judiciaire et lâĂ©quilibre des pouvoirs rĂ©flexions Ă propos des rĂ©centes rĂ©formes », Pyramides, 29 2017, 93-118. RĂ©fĂ©rence Ă©lectronique FrĂ©dĂ©ric Bouhon et Quentin Pironnet, Le pouvoir judiciaire et lâĂ©quilibre des pouvoirs rĂ©flexions Ă propos des rĂ©centes rĂ©formes », Pyramides [En ligne], 29 2017, mis en ligne le 01 fĂ©vrier 2019, consultĂ© le 17 aoĂ»t 2022. URL de page ArticleL231-6 du Code de l'organisation judiciaire - Les rĂšgles concernant la compĂ©tence, l'organisation et le fonctionnement de la juridiction de proximitĂ© statuant en matiĂšre pĂ©nale sont fixĂ©es par le code de procĂ©dure pĂ©nale et, en ce qui concerne les mineurs, par l'ordonnance n° 45-174 du 2 fĂ©vrier 1945 relative Ă l'enfance ï»żActions sur le document Article L231-3 La juridiction de proximitĂ© connaĂźt, en matiĂšre civile, sous rĂ©serve des dispositions lĂ©gislatives ou rĂ©glementaires fixant la compĂ©tence particuliĂšre des autres juridictions, des actions personnelles ou mobiliĂšres jusqu'Ă la valeur de 4 000 euros. Elle connaĂźt des demandes indĂ©terminĂ©es qui ont pour origine l'exĂ©cution d'une obligation dont le montant n'excĂšde pas 4 000 euros. Elle connaĂźt, dans les mĂȘmes limites, en vue de lui donner force exĂ©cutoire, de la demande d'homologation du constat d'accord formĂ©e par les parties, Ă l'issue d'une tentative prĂ©alable de conciliation. DerniĂšre mise Ă jour 4/02/2012 Codede l'organisation judiciaire : Article L232-3 Les cookies nous permettent de personnaliser les annonces. Nous partageons des informations sur l'utilisation de notre site avec nos partenaires de publicitĂ©, qui peuvent combiner celles-ci avec d'autres informations que vous leur avez fournies ou qu'ils ont collectĂ©es lors de votre utilisation de leurs services. Un mouvement de dĂ©pĂ©nalisation de vie des affaires a Ă©tĂ© amorcĂ© depuis une quinzaine dâannĂ©es. Toutefois, les infractions qui peuvent ĂȘtre reprochĂ©es aux dirigeants dâentreprise restent trĂšs nombreuses et relĂšvent de branches trĂšs diverses du droit. Il nâest pas question dâĂ©tudier de façon exhaustive toutes les infractions applicables, mais de dresser les caractĂ©ristiques des catĂ©gories dâinfractions qui concernent le plus grand nombre de dirigeants dâentreprise. 1. Les infractions de droit commun Un certain nombre dâinfractions de droit commun appliquĂ©es au droit des affaires sont prĂ©vues dans le Code pĂ©nal abus de confiance, escroquerie, vol, faux en Ă©crituresâŠ. a. Lâescroquerie Le dĂ©lit dâescroquerie est prĂ©vu Ă lâarticle 313-1 du Code pĂ©nal. Les dirigeants sont dĂ©clarĂ©s coupables dâescroquerie, en rĂšgle gĂ©nĂ©rale, pour avoir employĂ© des manĆuvres frauduleuses aux fins de procurer des fonds Ă leur entreprise. Les manĆuvres frauduleuses sont des plus diverses, et notamment La prĂ©sentation de bilans falsifiĂ©s pour obtenir dâune banque des prĂȘts ; La rĂ©alisation dâune augmentation fictive de capital aux fins de tromper un prĂȘteur Ă©ventuel. Les manĆuvres doivent avoir Ă©tĂ© dĂ©terminantes dans la remise des fonds ou de valeurs ou dans la fourniture de service. Lâintention du dirigeant de commettre lâinfraction doit, par ailleurs, impĂ©rativement ĂȘtre Ă©tablie. b. Lâabus de confiance Le dĂ©lit dâabus de confiance est prĂ©vu Ă lâarticle 314-1 du Code pĂ©nal. Les dirigeants dâentreprise sont dĂ©clarĂ©s coupables dâabus de confiance, le plus souvent, pour avoir dĂ©tournĂ© des fonds quâils avaient reçus en qualitĂ© de mandataires. Il en est ainsi du dirigeant qui avait reçu, en cette qualitĂ© et Ă titre de mandat, les versements effectuĂ©s par des souscripteurs Ă une augmentation de capital, les avait affectĂ©s aux besoins gĂ©nĂ©raux de la trĂ©sorerie sociale, ladite augmentation ayant Ă©chouĂ©, la sociĂ©tĂ© avait dĂ©posĂ© son bilan et les souscripteurs nâavaient pu rentrer en possession des fonds remis. Il est Ă noter que lâexpert-comptable qui, en toute connaissance de cause masque les dĂ©tournements de fonds sociaux et Ă©tabli des procĂšs-verbaux dâassemblĂ©es gĂ©nĂ©rales autorisant certaines des opĂ©rations reprochĂ©es, se rend coupable de complicitĂ© dâabus de confiance. c. Le faux et usage de faux Le dĂ©lit de faux et usage de faux est prĂ©vu Ă lâarticle 441-1 du Code pĂ©nal. A titre dâexemple, est ainsi constitutif de dĂ©lit de faux lâĂ©tablissement de procĂšs-verbaux dâassemblĂ©es prĂ©tendument tenues et non effectivement rĂ©unies. 2. Les infractions au droit des sociĂ©tĂ©s Dans ses articles L. 241-1 Ă L. 248-1, le Code de commerce prĂ©voit les infractions que peuvent commettre les sociĂ©tĂ©s et/ou leurs dirigeants, en Ă©numĂ©rant des infractions spĂ©cifiques Ă certaines formes de sociĂ©tĂ©s et en prĂ©voyant Ă©galement des infractions communes aux diverses formes de sociĂ©tĂ©s commerciales. » Une lecture de ces quelques articles du Code de commerce donne un premier aperçu de tout un volet des risques encourus pĂ©nalement par un dirigeant dâentreprise. Les infractions les plus courantes sont lâabus de biens sociaux, lâĂ©mission de valeurs mobiliĂšres, la distribution de dividendes fictifs, la prĂ©sentation de comptes non-fidĂšles et lâabus de pouvoirs ou de voix. a. Lâabus de biens sociaux Les dirigeants sociaux ne doivent jamais confondre leurs propres biens avec ceux de la sociĂ©tĂ©. Le texte dâincrimination ici pour les gĂ©rants de SARL est des plus explicites Est puni dâun emprisonnement de cinq ans et dâune amende de 375 000 ⏠âŠ. 4° Le fait pour les gĂ©rants, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crĂ©dit de la sociĂ©tĂ©, un usage quâils savent contraire Ă lâintĂ©rĂȘt de celle-ci, Ă des fins personnelles ou pour favoriser une autre sociĂ©tĂ© ou entreprise dans laquelle ils sont intĂ©ressĂ©s directement ou indirectement ; » article L. 241-3, 4° du Code de commerce. Cette infraction est Ă©galement prĂ©vue par les articles L. 242-6, 3° du Code de commerce pour le prĂ©sident, les administrateurs ou les directeurs gĂ©nĂ©raux dâune SA et L. 231-11, 3° du Code monĂ©taire et financier pour les dirigeants de la sociĂ©tĂ© de gestion dâune sociĂ©tĂ© civile de placement immobilier. Lâabus de biens sociaux est constituĂ© dâun Ă©lĂ©ment matĂ©riel et dâun Ă©lĂ©ment intentionnel. Dans lâexercice de leurs fonctions, les dirigeants sociaux disposent des biens contenus dans le patrimoine de la personne morale. Ils doivent dĂšs lors respecter la finalitĂ© juridique de leur pouvoir de gestion. Ainsi, une confusion de patrimoines, mĂȘme temporaire, est considĂ©rĂ©e comme un Ă©lĂ©ment matĂ©riel dâabus de biens sociaux. Tout emprunt de fonds sociaux pour rĂ©gler des dettes personnelles est, en effet, prohibĂ©. LâĂ©lĂ©ment intentionnel est retenu par les juges lorsque lâusage des biens de la sociĂ©tĂ© est effectuĂ© en toute connaissance de lâusage contraire aux intĂ©rĂȘts de la sociĂ©tĂ©. La mauvaise foi sâapprĂ©cie au regard des circonstances dans lesquelles les actes ont Ă©tĂ© commis. Elle se dĂ©duit nĂ©cessairement de la clandestinitĂ© des opĂ©rations rĂ©alisĂ©es par le dirigeant fautif. Se rend complice de lâabus de biens sociaux la personne coupable dâactes positifs qui, au moment de lâopĂ©ration dĂ©lictuelle, a connaissance que celle-ci est contraire Ă lâintĂ©rĂȘt social. Tel est le cas dâun administrateur provisoire qui a Ă©tĂ© dĂ©clarĂ© complice, en raison des instructions quâil avait donnĂ©es au dirigeant, lequel avait perçu un salaire abusif, sans contrepartie effective. La veuve dâun dirigeant a, quant Ă elle, Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©e coupable de recel dâabus de biens sociaux pour avoir conservĂ© des actions dâune sociĂ©tĂ© bĂ©nĂ©ficiaire dâun abus de biens sociaux, commis par son Ă©poux dĂ©cĂ©dĂ©, au dĂ©triment dâune autre sociĂ©tĂ© quâil dirigeait b. LâĂ©mission de valeurs mobiliĂšres Lâarticle 241-2 du Code de commerce punit dâun emprisonnement de six mois et dâune amende de 9 000 âŹ, le gĂ©rant dâune SARL coupable dâĂ©mission directe ou par personnes interposĂ©es pour le compte de la sociĂ©tĂ©, de valeurs mobiliĂšres quelconque tels que les bons de souscription dâaction, les bons de souscription de parts de crĂ©ateurs dâentreprise Ă lâexception des obligations Ă©mises dans les conditions dudit code. Cette mĂȘme infraction est Ă©galement prĂ©vue pour le prĂ©sident, les administrateurs et les directeurs gĂ©nĂ©raux dâune sociĂ©tĂ© anonyme article 242-6, 2° du Code de commerce. c. La distribution de dividendes fictifs Est puni de peine dâemprisonnement de cinq ans et dâune amende de 375 000 âŹ, tout gĂ©rant qui opĂšre, entre les associĂ©s, la rĂ©partition de dividendes fictifs, en lâabsence dâinventaire ou au moyen dâinventaires frauduleux article 241-3, 3° du Code de commerce. Il sâagit, ainsi, de sanctionner le gĂ©rant qui, sans avoir fait dâinventaire ou sur la base dâun inventaire frauduleux, distribue des dividendes aux associĂ©s alors que ces sommes nâĂ©taient pas distribuables. Cette mĂȘme infraction est Ă©galement prĂ©vue pour SA article 242-6, 3° du Code de commerce. La rĂ©partition de dividendes fictifs est une infraction intentionnelle imposant, en consĂ©quence, la mauvaise foi. La distribution doit avoir Ă©tĂ© effectuĂ©e en connaissance de cause par les auteurs, mĂȘme sâils nâen tirent aucun avantage personnel et mĂȘme si cette distribution a Ă©tĂ© approuvĂ©e par lâassemblĂ©e gĂ©nĂ©rale. d. La prĂ©sentation de comptes non-fidĂšles Sont punis de peine dâemprisonnement de cinq ans et dâune amende de 375 000 âŹ, les dirigeants de SARL et de sociĂ©tĂ©s par actions qui prĂ©sentent, aux associĂ©s, les comptes annuels ne donnant pas, pour chaque exercice, une image fidĂšle du rĂ©sultat des opĂ©rations de lâexercice, de la situation financiĂšre et du patrimoine. Les comptes sont, en effet, un Ă©lĂ©ment essentiel pour juger de la solvabilitĂ© dâune sociĂ©tĂ©, pour les associĂ©s comme pour les crĂ©anciers. Le Code du commerce rĂ©prime donc le gĂ©rant qui dissimule la vĂ©ritable situation de la sociĂ©tĂ© en ne fournissant pas les comptes prĂ©sentant une image fidĂšle de la situation rĂ©elle de lâentreprise articles du Code de commerce L. 241-3, 3° pour les SARL, L. 242-6, 2° pour les SA et L. 242-30, 1er pour une SA Ă directoire et conseil de surveillance et article L. 231-11, 2 du Code monĂ©taire et financier. Le dĂ©lit de prĂ©sentation de comptes infidĂšles peut causer un prĂ©judice direct aux associĂ©s ou aux porteurs de titres de la sociĂ©tĂ©. Ce prĂ©judice est Ă©tabli dĂšs lors que les comptes litigieux ont servi de base Ă lâĂ©valuation des titres acquis par le plaignant, mĂȘme si ces comptes ont Ă©tĂ© approuvĂ©s avant que ce dernier ne soit associĂ©. De mĂȘme, un Ă©tablissement financier a Ă©tĂ© admis Ă se constituer partie civile en rĂ©paration du prĂ©judice rĂ©sultant dâune prĂ©sentation de comptes infidĂšles dans la mesure oĂč celle-ci a dĂ©terminĂ© la banque Ă consentir son concours. Quant aux crĂ©anciers de la sociĂ©tĂ©, les juges vĂ©rifient dans chaque affaire que le prĂ©judice invoquĂ© est bien la consĂ©quence directe de lâinexactitude des comptes prĂ©sentĂ©s ou publiĂ©s. Est recevable Ă se constituer partie civile le crĂ©ancier dâune sociĂ©tĂ© dont les comptes falsifiĂ©s avaient justifiĂ© le maintien des relations contractuelles . e. Lâabus de pouvoirs ou de voix Sont punis de peine dâemprisonnement de cinq ans et dâune amende de 375 000 âŹ, les dirigeants de SARL et de sociĂ©tĂ©s par actions qui, de mauvaise foi, font, des pouvoirs quâils possĂšdent ou des voix dont ils disposent en cette qualitĂ©, un usage quâils savent contraire aux intĂ©rĂȘts de la sociĂ©tĂ©, Ă des fins personnelles ou pour favoriser une autre sociĂ©tĂ© ou une autre entreprise dans laquelle ils sont intĂ©ressĂ©s directement ou indirectement articles L. 241-3, 5° et L 242-6, 4°du Code de commerce. Lâusage abusif des pouvoirs est dĂ©terminĂ© par la conscience effective du dirigeant de faire courir un risque anormal Ă la sociĂ©tĂ©. Il en est ainsi du dirigeant qui sâabstient de rĂ©clamer Ă une autre sociĂ©tĂ© dans laquelle il est intĂ©ressĂ© le paiement de livraisons faites Ă cette derniĂšre. 3. Les infractions au droit social Les dirigeants dâentreprise encourent de trĂšs nombreuses infractions non intentionnelles liĂ©es Ă la lĂ©gislation du travail. Rappelons que les juges retiennent la responsabilitĂ© pĂ©nale des dirigeants dâentreprise dans le cas de ces infractions non intentionnelles », commises par un employĂ© de lâentreprise, son prĂ©posĂ©, dans le cadre de son travail, en application de lâarticle 121-3, al. 3 du Code pĂ©nal. MĂȘme si la Chancellerie recommande aux parquets de ne poursuivre, en cas dâinfractions non intentionnelles et de nature technique, que la personne morale et non pas le dirigeant personne physique, il apparaĂźt dans les faits, que les dirigeants sont trĂšs souvent poursuivis aux cĂŽtĂ©s de la personne morale, mĂȘme sans faute personnelle avĂ©rĂ©e. Nâoublions pas non plus quâen cette matiĂšre de droit social, les dĂ©lĂ©gations de pouvoirs sont courantes. La responsabilitĂ© pĂ©nale du dirigeant dâentreprise peut ĂȘtre engagĂ©e principalement sur le fondement du Code pĂ©nal et du Code du travail. a. Les infractions au Code pĂ©nal Un certain nombre dâinfractions qui constituent des atteintes involontaires Ă la vie et Ă lâintĂ©gritĂ© physique sont qualifiĂ©es de dĂ©lits. Ainsi, en cas dâaccident du travail, le dirigeant peut ĂȘtre poursuivi, aux cĂŽtĂ©s de la sociĂ©tĂ© personne morale, du chef dâhomicide involontaire pour avoir causĂ© par maladresse, imprudence, inattention, nĂ©gligence ou manquement Ă une obligation de prudence ou de sĂ©curitĂ© imposĂ©e par la loi ou le rĂšglement », la mort dâautrui article 221-6 du Code pĂ©nal, ou encore du chef de blessures involontaires quand lâincapacitĂ© totale de travail qui en rĂ©sulte est supĂ©rieure Ă trois mois article 221-19 du Code pĂ©nal. Par ailleurs, le dĂ©lit de mise en danger dâautrui rĂ©prime les manquements graves aux mesures de sĂ©curitĂ© ou de prudence mĂȘme en lâabsence de dommages article 223-1 du Code pĂ©nal Le fait dâexposer directement autrui Ă un risque immĂ©diat de mort ou de blessures de nature Ă entraĂźner une mutilation ou une infirmitĂ© permanente par la violation manifestement dĂ©libĂ©rĂ©e dâune obligation particuliĂšre de prudence ou de sĂ©curitĂ© imposĂ©e par la loi ou le rĂšglement est puni dâun an dâemprisonnement et de 15 000 ⏠dâamende ». Le dĂ©lit de mise en danger nâest constituĂ© que si le dirigeant a connaissance que le risque liĂ© au manquement relevĂ© a Ă©tĂ© la cause directe et immĂ©diate du risque auquel il a Ă©tĂ© exposĂ©. Tel nâa pas Ă©tĂ© le cas du directeur dâusine qui nâa pas tenu compte dâune lettre de mise en garde adressĂ©e par lâinspection du travail du fait de violations rĂ©glementaires, parce quâil nâa pas Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© un lien immĂ©diat » entre ces violations et le risque auquel avaient Ă©tĂ© exposĂ©s les salariĂ©s ». b. Les infractions au Code du travail Le dirigeant est susceptible dâĂȘtre poursuivi pour de trĂšs diverses infractions au Code du travail tout au long de la relation de travail avec son salariĂ©. Le dirigeant peut dâabord ĂȘtre poursuivi pour des infractions intentionnelles, et donc naturellement pour des faits personnels, du chef de harcĂšlement moral et sexuel, dĂ©finis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 du Code du travail et punis dâun emprisonnement dâun an et dâune amende de 15 000 âŹ. Les autres infractions sont pour la plupart des infractions matĂ©rielles. Les infractions lors de lâembauche Les peines prĂ©vues pour les infractions liĂ©es Ă lâembauche sont sĂ©vĂšres, puisque les dirigeants dĂ©clarĂ©s coupables encourent, non seulement une amende, mais Ă©galement une peine dâemprisonnement. Attention donc notamment de ne pas faire publier une offre dâemploi comportant une mention discriminatoire fondĂ©e, notamment, sur lâapparence physique, lâĂąge, la situation familiale, le sexe, sauf exceptions articles L. 1142-1, L. 1142-2 et L. 1144-1 du Code du travail. Attention Ă©galement de ne pas refuser dâembaucher un candidat en raison de son sexe, de ses mĆurs, son orientation sexuelle, sa situation familiale, son origine, son Ă©tat de santé⊠articles L. 1132-1 Ă L. 1132-4 et L. 1142-1 et L 1142-2 du Code du travail et articles 225-1 et suivants du Code pĂ©nal. ou mĂȘme de son Ă©tat de grossesse articles L. 1225-1 Ă L. 1225-3 du Code du travail. Les infractions relatives au travail dissimulĂ© Les dirigeants peuvent en maintes circonstances ĂȘtre poursuivis pour travail dissimulĂ© articles L. 8221-1, L. 8221-2 et L. 8221-3, L 8221-5 du Code du travail. Les infractions lors de lâexĂ©cution du contrat de travail La responsabilitĂ© pĂ©nale des dirigeants peut ĂȘtre mise en jeu pour diverses violations Ă la rĂ©glementation du droit du travail, et notamment celles relatives Ă la durĂ©e lĂ©gale du travail articles R. 3124-3 et R. 3124-4 du Code du travail, les heures supplĂ©mentaires articles R. 3124-6, R. 3124-7, R 3124-11 et R. 3124-12 du Code du travail, le travail Ă temps partiel ou le travail intermittent articles R. 3124-5, R. 3124-8, R. 3124-9 et R. 3124-10 du Code du travail. Au repos des salariĂ©s articles R. 3135-1, R. 3135-2 Ă R. 3135-4, articles R. 3143-1. Au salaire non-respect du SMIC ou de la garantie de rĂ©munĂ©ration article R. 3233-1 du Code du travail, inĂ©galitĂ© de rĂ©munĂ©ration entre les hommes et les femmes article R. 3222-1 du Code du travail. Les infractions relatives aux rĂšgles dâhygiĂšne et de sĂ©curitĂ© Les dirigeants sont soumis aux dispositions du Code du travail relatives Ă lâhygiĂšne, Ă la sĂ©curitĂ© et aux conditions de travail des salariĂ©s. Ainsi, notamment, lâarticle L 4741-1 du Code du travail sanctionne lâatteinte aux dispositions sur lâhygiĂšne et la sĂ©curitĂ©. Les infractions relatives aux rĂšgles dâhygiĂšne et de sĂ©curitĂ© Les dirigeants qui portent ou tentent de porter atteinte Ă lâinstauration dâune institution reprĂ©sentative du personnel, Ă sa libre dĂ©signation ou Ă lâexercice rĂ©gulier de ses fonctions se rendent coupables du dĂ©lit dâentrave. Un dirigeant peut Ă©galement ĂȘtre poursuivi pour diverses infractions Ă la lĂ©gislation sur les cotisations sociales, dont lâinfraction de non-paiement des cotisations Ă lâĂ©chĂ©ance articles R. 244-4 Ă R. 244-6 du Code de la sĂ©curitĂ© sociale. 4. Les infractions au droit des entreprises en difficultĂ© Les dirigeants dâentreprise encourent un risque trĂšs important sur leur patrimoine personnel en cas de liquidation judiciaire liĂ©e Ă des fautes de gestion Ă lâorigine de lâinsuffisance dâactif. Les dirigeants dâentreprise prennent le risque de voir Ă©galement leur responsabilitĂ© pĂ©nale ĂȘtre engagĂ©e, notamment lorsquâils tardent Ă dĂ©clarer lâĂ©tat de cessation des paiements ou dissimulent sa constatation. Les dirigeants de lâentreprise en difficultĂ© peuvent ainsi commettre diffĂ©rents dĂ©lits au cours de la procĂ©dure de redressement ou de liquidation judiciaire. Le dĂ©biteur personne physique ou le dirigeant dâune personne morale, qui demande lâouverture dâune procĂ©dure de sauvegarde, nâĂ©chappe Ă toute sanction quâau titre de la banqueroute. Lâinfraction principale quâencourt le dirigeant de lâentreprise en difficultĂ© est le dĂ©lit de banqueroute prĂ©vu par lâarticle L. 654-2 du Code de commerce. Pour que le dĂ©lit soit constituĂ©, le dirigeant doit, non seulement avoir commis les faits condamnables en connaissance de lâĂ©tat de cessation des paiements, mais ces actes doivent ĂȘtre rĂ©alisĂ©s dans lâintention dâĂ©viter ou de retarder lâouverture de la procĂ©dure de redressement ou de liquidation judiciaire. 5. La fraude Lâarticle 1741 du Code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts prĂ©voit le dĂ©lit fiscal et en dĂ©taille les Ă©lĂ©ments constitutifs ainsi que les peines qui sây rattachent âŠ, quiconque sâest frauduleusement soustrait ou a tentĂ© de se soustraire frauduleusement Ă lâĂ©tablissement ou au paiement total ou partiel des impĂŽts visĂ©s dans la prĂ©sente codification, soit quâil ait volontairement omis de faire sa dĂ©claration dans les dĂ©lais prescrits, soit quâil ait volontairement dissimulĂ© une part des sommes sujettes Ă lâimpĂŽt, soit quâil ait organisĂ© son insolvabilitĂ© ou mis obstacle par dâautres manĆuvres au recouvrement de lâimpĂŽt, soit en agissant de toute autre maniĂšre frauduleuse, est passible, indĂ©pendamment des sanctions fiscales applicables, dâune amende de 37 500 ⏠et dâun emprisonnement de cinq ans. Lorsque les faits ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s ou facilitĂ©s au moyen soit dâachats ou de ventes sans facture, soit de factures ne se rapportant pas Ă des opĂ©rations rĂ©elles, ou quâils ont eu pour objet dâobtenir de lâĂtat des remboursements injustifiĂ©s, leur auteur est passible dâune amende de 75 000 ⏠et dâun emprisonnement de cinq ans. » Toutefois, cette disposition nâest applicable, en cas de dissimulation, que si celle-ci excĂšde le dixiĂšme de la somme imposable ou le chiffre de 153 âŹ. Toute personne condamnĂ©e en application des dispositions du prĂ©sent article peut ĂȘtre privĂ©e des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalitĂ©s prĂ©vues par lâarticle 131-26 du Code pĂ©nal. La juridiction peut, en outre, ordonner lâaffichage de la dĂ©cision prononcĂ©e et la diffusion de celle-ci dans les conditions prĂ©vues aux articles 131-35 ou 131-39 du Code pĂ©nal. Les procĂ©dĂ©s de fraude fiscale les plus frĂ©quemment employĂ©s sont Ă©numĂ©rĂ©s de façon non limitative dans lâarticle 1741 du Code GĂ©nĂ©ral des ImpĂŽts. Il sâagit, notamment, de lâomission volontaire de dĂ©claration dans les dĂ©lais prescrits, de la dissimulation de sommes sujettes Ă lâimpĂŽt, de lâorganisation dâinsolvabilitĂ©. Outre les peines principales amendes et emprisonnement, accessoires et complĂ©mentaires encourues en cas de fraude fiscale, le tribunal peut Ă©galement condamner le dirigeant au paiement solidaire de lâimpĂŽt fraudĂ©. En conclusion, prĂ©cisons que le dirigeant dâentreprise peut Ă©galement se voir reprocher dâautres infractions dans un certain nombre dâautres branches du droit quâil nâest pas possible de traiter plus avant. Il sâagit, notamment, dâinfractions en matiĂšre de distribution ou de consommation, dâinfractions au droit de lâenvironnement et au droit boursier. V7dwJPY. 234 327 93 255 374 78 300 388 63